Un scandale en cours de réalisation à Grand Canyon

Claude ROZSA Le 14 janvier 2015 à 08h59

Ce n’est pas parce que nous sommes Français que les atteintes à la nature dans d’autres pays doivent nous laisser indifférents voire passifs quand bien même notre poids sur les décisions à prendre ou presque prises serait infinitésimal.
La conclusion de l’article, voire son ton pourront paraître à certains ridicule et prêter à sourire ; je l’assume entièrement. Oui je suis un être sensible, amoureux fou de ce site sans égal dans le monde par sa puissance, le mystère qu’il dégage, la force de la remise en question de soi-même qu’il déclenche chez la majorité. Je ne suis pas comme ces deux jeunes Français rencontrés un jour sur le Bright Angel Trail se plaignant de l’odeur laissée par les mules sur le parcours par leurs excréments. Désolé elles ne peuvent pas aller aux toilettes et les éboueurs ne passent pas à heure fixe ! Ce vous dérange remonter sur le rim ?!

Un scandale que l’on ne peut passer sous silence si l’on est amoureux de la nature et de l’un des plus beaux sites naturels du monde est entrain de se mettre en place.

Le Grand canyon est une des merveilles du monde, classée au patrimoine de l’humanité si mes souvenirs sont bons. Les Européens sont très minoritaires à y randonner quand on recense le nombre d’entre eux qui vont y passer plus d’une journée, et encore ne le font-ils que sur le célébrissime Bright Angel Trail, véritable Champs Elysées menant au fleuve Colorado.
Il est vrai que décider de randonner au fond du canyon non seulement exige de bonnes conditions physiques mais également une préparation car le parc, à juste titre, impose des conditions d’accès drastiques : permis de randonnée payant qui ne peut avoir de chances d’être obtenu que si demandé par écrit (interdiction de le faire par téléphone), au moins 6 mois à l’avance. Parcours accordé par les autorités du parc en fonction du nombre prédéterminé de randonneurs pouvant séjourner au même endroit pendant 24h consécutives, etc... Ceci garantit le respect maximal de l’environnement, une protection sans pareille de la nature, de la faune et de la flore. On ferait bien de s’en inspirer, en particulier dans les Alpes quand on voit notamment ce qui se passe au Mont Blanc.
Hélas le Parc National n’a autorité que dans les limites géographiques qui lui sont imparties et l’on a vu déjà récemment comment la folie et l’appât du gain peut entrainer un manque total de respect du site dans son ensemble et en dehors du Parc, avec l’inacceptable et indéfendable Skywalk construit sous l’égide de la tribu Hualapai à l’ouest du parc peu avant que le Colorado ne débouche dans Lake Mead près de Las Vegas. A force d’avoir été - tout au long du XXe siècle - canalisé par de multiples barrages dont le dernier coûteux et catastrophique de Glen Canyon, le fleuve , lorsqu’il arrive à son embouchure dans la baie de Californie, se réduit aujourd’hui à un vaste champ de marais pollués par des objets de toutes sortes. On peut voir sur Youtube le documentaire intégral ramené par deux jeunes gens qui ont été subventionnées par différents organismes et ont parcouru le fleuve de la source dans le Wyoming de la Green River son principal affluent, jusqu’à son embouchure en un peu plus de trois mois. On cherche vainement où vraiment coule encore le fleuve exploré la première fois en 1869 par John Wesley Powell, vétéran de la guerre de Sécession où il avait perdu l’un de ses bras. A l’époque on estime le débit du fleuve à plus de 100000 pieds cubes par seconde (2830 mètres cubes par seconde soit l’équivalent d’une tour de 28m si l’on prend une surface au sol de 100m², chaque seconde !!!), niveau qu’il n’a atteint qu’au printemps 1983 lorsque les autorités de l’Arizona décidèrent un délestage en catastrophe du barrage de Glen Canyon sur le point de céder sous le poids de l’eau croissant de manière exponentielle en raison de pluies diluviennes qui avaient affecté de nombreux affluents en amont du fleuve. On lira avec intérêt le livre de Kevin Fedarko "The emerald Mile" relatant la prouesse quelque peu illégale de trois jeunes rafteurs décidés à voir comment Powell avait bien pu réaliser son exploit en 1869. Ils voulaient aussi battre le record de vitesse de la descente des quelques 280 miles (environ 480 kms) qu’il réalisèrent en quelques 36 heures ! Aujourd’hui le débit du fleuve oscille entre 8 et 25000 pieds cubes seconde (700 mètres cubes par seconde maximum). Les conséquences de ces constructions au plan environnemental, tant sur la flore que sur la faune , sont parfaitement visibles.
Dans les années 60, grâce à la formidable mobilisation de la population américaine par le Sierra Club, équivalent en plus puissant de notre Club Alpin, fut arrêté de justesse le projet de construction dans Marble Canyon de deux barrages qui auraient purement et simplement rayé de la carte ce magnifique site naturel, en le transformant en un lac jusqu’à Las Vegas ou presque ! Le Sierra Club alla jusqu’à acheter des pages entières des grands journaux américains pour mener sa campagne, et demanda à ses adhérents de menacer leur représentants aux deux chambres de l’Etat Fédéral de ne pas les réélire s’ils donnaient leur aval à une pareille entreprise de destruction. Une législation s’ensuivit qui en principe devrait empêcher un pareil délire de se renouveler. Mais hélas comme dit plus haut cela ne vaut que dans les limites du parc national.
Aujourd’hui un nouveau délire ou plutôt deux nouvelles décisions sont en passe de devenir des réalités venant saccager ce merveilleux site.
D’une part dans le village de Tusayan qui se trouve proche de l’entrée sud du parc, le conseil de la ville a donné son accord avec celui des habitants pour la construction de 2000 logements, un centre commercial de 300000m², un spa et un ranch pour gens voulant se donner des allures de cowboys (voir à ce propos le délicieux film City Slickers (1991) avec Billy Crystal, titre lamentablement traduit par "La vie, l’amour...les vaches" ou l’art de mettre par terre une production en France !) . Tout cela grâce entre autres à la complicité d’un groupe italien et d’investisseurs américains qui réussirent par l’achat en toute tranquillité de parcelles de terrains et de forêts adjacentes à prendre le contrôle du conseil municipal. A quand les casinos et les gratte-ciels !?
Ceci ne serait encore que d’une gravité moyenne si le Conseil dirigeant la Nation Navajo, dont la réserve est adjacente au Parc à l’est, n’avait mis en branle un projet de construction d’une télécabine entre Cape Solitude et la confluence du Colorado et de son affluent le petit Colorado. (Lien vers la photo ci-dessous que j’ai prise lors de ma première randonnée sur les Tanner et Beamer Trail en Mai 1996).

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(à droite le petit Colorado aux eaux turquoises en basses eaux et à 20-25°, à gauche le Colorado dont la température ne dépasse jamais les 10°C tout au long de l’année du fait du barrage. Copyright Claude ROZSA)

Il est estimé que ce superbe ouvrage déversera chaque jour la bagatelle de 4000 touristes sur cet espace réduit bien que dans un site grandiose et démesuré. Cape Solitude surplombe - sur la partie droite et non visible de l’image - la confluence à une altitude de quelques 1843m ; la confluence se situe à 816m d’altitude.

Il faut savoir par ailleurs que nous sommes ici dans un site sacré pour les Indiens des tribus Hopi et Navajo. A quelques kms en amont du petit Colorado se trouve le SIPAPU. Pour la croyance indienne c’est là que l’homme est apparu sur terre. En accord avec les autorités du parc il est strictement interdit aux randonneurs de camper à moins de 500-600m de la confluence, et encore à cet endroit se trouve-t’on sur une petite plage de sable qui peut être envahie sans crier gare par le fleuve au moindre délestage du barrage, ce qui a lieu régulièrement ; les rafteurs disposent pour leurs descentes des calendriers précis et quotidiens, heure par heure de ces montées d’eaux qui vont conditionner les lieux où ils vont faire camper leurs voyageurs ou s’arrêter pour excursionner dans les magnifiques canyons latéraux mais aussi la plus ou moins grande difficulté du passage des quelques 60 rapides majeurs sur le fleuve. Des conditions encore plus restrictives sont imposées aujourd’hui pour préserver de rares espèces de faune et de flore. En aval, non loin de la confluence, se trouvent des mines de sel qui elles aussi ont un caractère sacré dans la culture Hopi. Sauf erreur des cérémonies y ont cours régulièrement encore aujourd’hui mais c’est à vérifier.

Tout ceci est parfaitement documenté et connu des autorités indiennes. On ne peut plus par exemple amarrer son raft à la confluence comme on le voit en 1996 sur la photo. La confluence n’est pas accessible la nuit ; cela nous fera sourire, nous autres Français, mais aux USA les randonneurs venant ici sont des amoureux de la nature et n’ont pas besoin d’avoir la peur du gendarme pour respecter les lois.

Il faut avoir passé des journées et des nuits dans le canyon pour comprendre réellement la transformation psychologique qui en résulte à la vue d’un tel site. Pour paraphraser Bonaparte aux Pyramides, ici 2.5 milliards d’années d’histoire du globe vous narguent ! Voici un extrait du livre que je suis en train de mettre en ligne et qui n’a aucun but commercial sinon celui de donner envie à des randonneurs et amoureux de la nature d’aller faire un tour dans ce lieu magique, il donne par son humour une idée de cette démesure :

"Dieu et le Grand Canyon

C’est lui qui prit la décision de le rendre si profond oubliant que des êtres humains voudraient en atteindre le fond !
C’est lui qui le dota d’un climat instable aux températures extrêmes.
En un mot il n’a pas trop réfléchi car en 7 jours, il n’avait pas que cela à faire !
Dieu créa le monde en 6 jours et se reposa le 7e. Il devait faire face à un cahier des charges drastique et gigantesque.
Si l’on part du fait que les temps géologiques connus aujourd’hui représentent environ 4600 millions d’années, il s’ensuit que si nous représentons sur notre échelle temporelle celles de Dieu, on peut dire que :
Sa journée est égale à 767 millions d’années,
Son heure, à 32 millions d’années,
Sa minute, à environ 532000 ans,
Sa seconde, à 9000 ans.
Dieu s’est accordé par ailleurs, environ 12 milliards d’années pour former la terre et le cosmos ce qui fait que l’on peut penser que :
La première année des temps géologiques s’est formée aux premières heures du lundi matin après son petit déjeuner. Le Vishnu schiste autour de17h le jeudi, s’est déposé sur le fonds d’une mer contenant de nombreux organismes microscopiques et des bactéries de toutes sortes. Il est riche en quartz et divers argiles qui se sont mélangés aux laves et dépôts volcaniques de la période précédente. Ceci explique la couleur presque noire des roches au fond du canyon et leur caractère tranchant. Dans cette région le randonneur doit être prudent, des accidents graves peuvent survenir comme rupture de tendons et autres qui compromettent irrémédiablement la randonnée et imposent des secours immédiats et complexes pour l’évacuation par hélicoptère…..
Pendant les heures qui suivirent les roches déposées au fonds de l’océan se sont progressivement transformées sous l’effet de la pression et des compressions successives si bien qu’elles sont devenues des schistes et du gneiss. Elles ont servi d’assises à des montagnes au moins aussi hautes que les Rocheuses voire plus. Certains géologues parlent de hauteur avoisinant les 30000 mètres ! Mais tout ceci n’est qu’hypothèses très controversées car aucune trace fossile n’a été retrouvée dans cette partie du grand canyon.
Progressivement l’érosion a détruit les montagnes et une plaine l’a remplacé.
Lentement cette plaine s’est affaissée et a laissé place à un nouvel océan qui cycliquement se retirait vers l’ouest de la région.
Vers 9h du matin le vendredi suivant, des sédiments marins et des roches d’origine volcanique ont commencé à se déposer sur des hauteurs de plusieurs kilomètres. On appelle cette formation dont il ne reste que quelques traces, le Grand Canyon Supergroup.
Vers 22h du soir le vendredi, les secousses sismiques qui ont affecté la région ont créé des failles dans lesquelles le Supergroup s’est progressivement effondré et a été érodé. Quelques restes du Supergroup demeurèrent qui à leur tour disparaissaient de telle sorte que vers 7 heures du matin le samedi, le Tapeats commença à se déposer sur la couche de Vishnu Schist érodée précédemment. A cette heure, seuls des invertébrés sont les témoins vivants de cette période. Mais surtout, et c’est là l’un des phénomènes importants et marquants du Grand Canyon, prés de 1200 millions d’années de dépôts de matériaux rocheux ont disparu sans laisser de traces et l’on obtient ce que l’on appelle The Great Uncomformity. Le Tapeats repose directement sur le Vishnu Schist. Un jour et demi de notre calendrier a disparu d’un seul coup sans laisser de traces. Durant cette période, notre système solaire fit 4 ou 5 révolutions autour de la voie lactée…..

900 mètres au dessus du Tapeats se trouvent les couches les plus récentes Elles se sont déposées aux alentours de 17h ce samedi.
Dieu avait encore du pain sur la planche et voulait bien sûr ajouter quelques détails au paysage….Il avait déjà installé dans la région des insectes, des reptiles et des amphibiens, mais aussi des herbivores et des carnivores ; seuls manquaient à l’appel les dinosaures ! De plus l’actuel Arizona se trouvait à la hauteur de l’équateur formant un tout avec l’Amérique du sud et les reste d’un continent qu’on appelle le Pangea Nord.
La séparation des continents et leur dérive n’avaient pas encore eu lieu à cet endroit. Au dessus du Kaibab se trouvait une couche d’environ 2500 mètres qui disparut en totalité ou en partie à la suite de violents tremblements de terre. Les seuls restes visibles sont en particulier le Painted Desert et Zion National Park en UTAH au nord de Grand Canyon. Cette disparition eut lieu autour de 22h ce samedi soir.
C’est à 23h49 environ que commença à se former enfin le Grand Canyon. A la vitesse de 15 mètres par minute, le sol s’effondra et la faille se creusa. Les mammifères occupaient déjà le sud ouest des Etats Unis mais aucun bipède n’était encore apparu du style HOMO SAPIENS ou AUSTRALOPITHECUS AFRICANUS !
Vers 23h56, un volcan entra en éruption sur la région ouest du Grand Canyon, déversant plus de 16 milliards de m3 de lave !!!!Il forma un barrage de prés de 700 mètres de hauteur et un énorme lac qui s’étendit sur toute la région jusqu’aux confins nord de l’UTAH et de l’actuel Lake Powell ! Mais la force des courants et l’érosion eurent tôt fait de détruire le barrage de lave laissant la place au Colorado et sa formidable force destructrice. Quelques millisecondes suffirent pour ne faire qu’une bouchée de pain de cet insignifiant obstacle ! Plusieurs éruptions similaires ayant les mêmes effets se produisirent dans les minutes suivantes et trouvèrent la même issue.
A 23h58’33’’1/3, des éléphants nomades, venus d’Asie pendant la dernière période glacière, en passant par un pont naturel sur le détroit de Behring, s’installèrent dans la région de Grand canyon. Ce furent les premiers à en apprécier la beauté !
C’est au cours des derniers milliardièmes de seconde de cette folle journée que le Major Lesley Powell, fit la première descente en bateau du Colorado. Nous sommes à l’aube du 7e jour et en 1869 de notre ère !
Dieu s’installa enfin confortablement à l’El Tovar Hôtel, le cinq étoiles de la rive sud, pour apprécier lui aussi son magnifique travail tout en sirotant un Whisky on the rocks 100 ans d’âge !
Evidemment il ne put empêcher l’homme et sa constante bêtise et cupidité de construire différents barrages sur le Colorado et la Green River, détruisant ainsi différentes espèces tant animales que végétales et engloutissant de magnifiques paysages au fond des lacs de retenue. Des centrales hydroélectriques, une centrale prés de Page, brûlant du charbon, eurent en partie raison de la pureté de l’air de cette région magnifique.
Décidément on ne peut faire confiance à personne !
De son côté, ne pouvant rien faire pour résoudre la question de la soit disant liberté d’entreprendre et de la stupidité humaine, pierre d’achoppement constante avec le parti de l’opposition mené par Satan, Dieu se pencha sur des problèmes philosophiques et leurs solutions éventuelles.
Toutes choses bien considérées, il conclut qu’il avait fait vraiment du bon boulot pendant toute cette semaine..."
(source : texte écrit par je ne sais plus quel auteur, je crois du parc et que j’ai traduit.cf : Symphonie minérale de Claude ROZSA)

Trêve d’humour ! Comment peut-on froidement trahir ses origines au plan culturel et religieux quand bien même on ne croirait en aucune divinité quelle qu’elle soit, comment peut-on, connaissant les lieux et leur caractère unique et grandiose, décider d’une telle monstruosité.

Il n’est pas besoin d’être un scientifique ou un spécialiste de la faune et de la flore pour imaginer les conséquences à court et long terme d’une telle décision qui est quasiment acquise sauf évènement majeur de dernière minute. Comment se fait-il que les autorités de l’Arizona, alors que le gouvernement de la réserve a des droits prévus par les législations des états ou fédérales, n’intervient pas et ne fait pas de pressions pour interdire pareil saccage ? Comment se fait-il sauf erreur que le Sierra Club lui non plus n’intervient pas comme il le fit dans les années 60 ? Il se pourrait , me dit-on , que le Parc intervienne au motif qu’il y aurait dans le projet un petit empiètement de celui- ci sur le territoire du parc...A voir...

Tout cela laisse pantois. J’écris cet article parce que depuis 1990 je suis devenu si je puis dire un drogué du site. J’y ai parcouru quelques 800kms ; j’y ai éprouvé les plus belles émotions de ma vie que rien ne peut égaler et pourtant j’ai pas mal voyagé arrivé aujourd’hui à 73 ans révolus. Je me sens concerné, floué par des irresponsables qui vont détruire un lieu que je vénère. Mon ami Mike Buchheit Directeur du Grand Canyon Field Institute me recommanda à une journaliste venue enquêter sur le site en 2007, en ces termes que je traduis maladroitement. Elle demandait si de nombreux Français randonnaient dans le parc, il lui répondit " Pas beaucoup mais nous avons un Français un peu excentrique [tu parles !] qui vient régulièrement y passer quelques nuits tant il est envoûté par notre site...contactez le de ma part et interrogez le sur ses motivations". J’ai le regret de dire qu’hélas elle ne comprit pas grand chose à notre discussion sur la rive gauche. Venir pour un amoureux de la nature dans ce lieu n’a rien à voir avec un voyage de tourisme grand luxe au El Tovar même pour y côtoyer et discuter avec Dieu dans un des salons VIP ; non il n’y a pas de Cobra dans le parc, les serpents à sonnette, scorpions, tarentules et autres bestioles pas très accueillantes nous suffisent largement. On doit faire attention aux écureuils, de sacrés petits malins quand ils ont décidé de vous chaparder votre petit déjeuner lyophilisé ! La salle de bains dernier cri, c’est le cas échéant un ruisseau intermittent et encore sous des conditions d’utilisation strictes édictées par le parc, quant aux toilettes...bon je ne vais pas entrer dans des détails mais attention : quand il y en a, votre prédécesseur dans les lieux pourrait bien être un magnifique serpent à sonnette en train de digérer sa ripaille de la nuit précédente et qui déteste être réveillé en sursaut. Mais tout cet inconfort n’est rien en comparaison de cette vision inouïe qui vous transforme et vous impacte pour le restant de vos jours, sauf à n’avoir aucune sensibilité.

Je terminerai ce plaidoyer par cette description de ce qui m’arriva un matin vers les 5 heures. Je campais au bord du fleuve, chance rare obtenue des autorités du parc, les rafts sont prioritaires, près de Granite rapide. Je dormais à poings fermés nullement dérangé par le bruit de locomotive du rapide à quelques cents mètres de là dégringolant de ses 5.6m de hauteur sur quelques centaines de mètres de longueur. Je fus réveillé par du bruit, ce silence amplifie tout jusqu’à celui de la moindre brindille bousculée par une fourmi et jetais un coup d’œil par le vestibule de ma tente. On n’a pas très envie de se retrouver en compagnie d’un serpent ou scorpion profitant de qui sait quelle interstice de son petit logement. Je vis alors bouleversé un daim du canyon, croisement des mules importées dans le canyon d’où leur nom de mule deer, entrain de boire à 50 pas de là avec ses petits. Je restai silencieux et ne pris pas mon appareil photo ou ma caméra malgré la forte tentation, admirant la beauté de la nature et d’une création dont nous sommes incapables de comprendre l’origine en dépit de nos croyances multiples ; je n’ai pas honte de le dire, je me mis à pleurer d’émotion. Alors je crie ici ma révolte sans grand espoir d’être entendu. C’est tout.

Claude ROZSA
Paris, le 11 Janvier 2015

Réponses

  • par francisLe 22 janvier 2015 à 12h24

    cool mec, tu as 73 ans, prends du recul. On a jamais empêché un chien de faire sa crotte. Moi aussi je me faisais du mauvais sang pour tous ces trucs et je me suis pris une maladie grave. Même sur ce site il y a des gens pour affirmer qu’un barrage sur un fleuve améliore le paysage en lui donnant des airs de fjord norvégien...
    J’ai un raid VTT de Valence à Vallon Pont d’Arc, un parcours établi après de multiples reconnaissances. J’ai eu chaud, ils ont reconstitué la grotte Chauvet sur la montagne d’en face. Mais je ne suis pas tranquille pour autant, je suis toujours à la merci d’un centre de loisirs, du gaz de schiste ou...la découverte d’une nouvelle grotte...
    Pour les amoureux de la nature comme nous il n’existe hélas que la fuite.

  • par claude rozsaLe 22 janvier 2015 à 13h17

    Merci pour ton commentaire Francis. Je crois que dans le cas de Grand Canyon les choses sont un peu différentes, la preuve en est la mobilisation qui permet de sauver le canyon dans les années 60 de la folle entreprise de construction de deux barrage qui l’aurait transformé en lac jusqu’à Las Vegas. Pour en prendre la mesure, si tu n’y es jamais allé voilà deux liens ; mon livre ici http://froggyatgcn.canalblog.com/ et ma dernière vidéo de ma descente en raft de 1995 du Colorado. Ce site est unique dans le monde : http://vimeo.com/115073268 .
    Si tu as envie de voir les autres vidéos dont les liens sont sur le livre, envoie moi un message et je t’enverrai un message privé avec le mot de passe. Je vais faire une nouvelle descente en raft de 18 jours en avril 2017, il me tarde d’y être mais je crains de voir l’horreur projetée dans cette confluence magique.. A quand le casino comme me le disait récemment un de mes amis US.

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