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Les Hautes Vallées Valdôtaines

Les hautes vallées valdôtaines sont le cadre d’une fabuleuse traversée en balcon qui relie le val d’Ayas à Courmayeur. Un parcours entre le Cervin et le versant italien du Mont Blanc.

En bref


Texte et Photos Johannes Braun pour Alpes Magazine

Cartes

L’Escursionista n° 7 : Valtournenche - Val d’Ayas Ovest;
l’Escursionista n° 6 : Valpelline - Saint Barthélemy;
l’Escursionista n° 5 : Gran San Bernardo - Valle di Ollomont;
l’Escursionista n° 1 : Monte Bianco - Courmayeur  

6 jours

Point culminant : 2 928 m
Niveau : Difficile
Panoramas grandioses sur les hauts sommets des Alpes.

Accès

Office de tourisme de Courmayeur, transfert en minibus jusqu’à Saint-Jacques (val d’Ayas). 

L'itinéraire

Au jour le jour

Jour 1 : Saint-Jacques (1689 m) - refuge du Grand Tournalin (2534 m)

Jour 2 : refuge du Grand Tournalin (2534 m) - col de Nannaz (2773 m) - col des Fontaines (2695 m) - Valtournenche (1500 m) - refuge de Barmasse (2170 m)

Jour 3 : refuge de Barmasse (2170 m) - fenêtre d’Ersaz (2290 m) - fenêtre du Tsan (2736 m) - col Terray (2775 m) - refuge de Cuney (2656 m)

Jour 4 : refuge de Cuney (2656 m) - col de Chaleby (2683 m) - col de Vessonaz (2788 m) - Oyace (1390 m)

Jour 5 : hospice du Grand-Saint Bernard (2469 m) - col d’Arc (2557 m) - col des Ceingles (2817 m) - col de Malatra (2928 m) - refuge Bonatti (2025 m)

Jour 6 : refuge Bonatti (2025 m) - crête du mont de la Saxe (2348 m) - Courmayeur (1200 m)

Carte : Claude Dubut / Alpes magazine

 Depuis le refuge de Cuney, le regard porte sur le Becca Torché (3 015 m) et le Becca di Vlou (3 032 m, au centre), des sommets jumeaux qui séparent les vals de Gressoney et d’Ayas. 

Lacet après lacet, la route se hisse sur les flancs du val d’Ayas. Fraîcheur matinale aidant, une odeur d’herbe tout juste coupée vient taquiner les narines d’un groupe de randonneurs avides de découvertes. À l’heure où les vaches se repaissent de verdure à l’alpage, les hommes sont affairés au remplissage des granges qui émaillent les hameaux de montagne. C’est qu’il faut subvenir aux besoins de ces dames durant les longs mois d’hiver si l’on veut que la « fontina » (spécialité fromagère de la vallée d’Aoste) continue d’enchanter les papilles. Au bout de ce monde, le hameau de Saint-Jacques est resté figé dans le temps. Assis près d’un vieux chalet, un morceau du fameux fromage dans une main et une miche de pain dans l’autre, j’ai tout à coup l’impression que la vie est simple. Au vert tendre des mélèzes, répond le déluge gris bleu de glace et de roc du massif du Mont-Rose. Sacré tableau pour une introduction.


Le Cervin en antipasti

Le soleil n’a pas encore atteint le refuge lorsque le groupe s’active. Aujourd’hui, deux cols sont au programme, manière de se mettre en jambes pour une semaine sous le signe de l’endurance. En six jours, nous ne parcourrons qu’un quart des 24000 mètres de dénivelé et 330 kilomètres que quelques coureurs d’exception avalent en moins de trois jours ! Le temps qu’il faut pour profiter du paysage. Premier dans l’ordre, le col de Nannaz regarde vers le sud, d’où de fins cirrus strient le ciel en lignes parfaitement parallèles. « Signe de changement de temps », pronostiqueraient les Anciens. À peine le temps d’admirer nos silhouettes dans le miroir d’un petit lac que le groupe bascule vers une célèbre vallée. Du col des Fontaines, l’inimitable pyramide penchée du Cervin détourne notre attention de la longue descente vers le clocher de Valtournenche. 1 200 mètres vers le bas. Tout cela pour remonter sur le versant d’en face en direction du lac de Tsignanaz. D’aucuns crieraient au masochisme. 

Cache-cache avec l'orage

C’est un de ces matins où la question n’est pas de savoir si la pluie viendra, mais quand ? Hier soir déjà, des cumulus bien dodus dominaient les montagnes, au point de les faire passer pour naines. On aurait espéré qu’ils déchargent leur trop-plein dans la nuit. Que nenni. Aujourd’hui, des nuées de toutes formes et couleurs envahissent la vallée et collent à ses versants.

Du refuge Jean Barmasse où nous avons passé la nuit, nous doublons le hameau de Cortina. La montée à la fenêtre d’Ersaz (herse en patois) nous réchauffe avant la longue traversée du vallon de Tsan (pâturage relativement plat en patois valaisan et valdôtain). Une petite pause sur l’éboulis surplombant le lac de Tsan et nous filons dompter le col éponyme. Dans notre dos, une immense colonne nuageuse commence à ronronner. Nous plongeons vers le bivouac Reboulaz pour nous mettre à l’abri. Ça tonne mais pas une seule goutte ne daigne tomber. Hésitation. Il nous reste deux cols à traverser avant de rejoindre le refuge de Cuney. Une grosse heure plus tard, l’orage éclate sur la crête d’en face. Le refuge n’est plus qu’à quelques encablures.

 Pointe de la Goletta

Reflets dans l'eau

Pas un souffle de vent ne trouble la surface de la petite mare. Si bien que Cuney et sa chapelle à toit de lauzes se reflètent impeccablement dans l’eau. Il ne manque qu’une silhouette au sommet du promontoire pour que la photo soit parfaite. Suivant les courbes bien lissées d’un vallon glaciaire, nous rejoignons le col de Chaleby (2 683 m). En chemin, un autre lac dévoile son collier de linaigrettes. Plus loin, le balcon de Piscina tourne notre regard vers le massif du Grand-Paradis, que nous traversions l’an passé. Souvenirs. Entre deux touffes de génépi, le col de Vessonaz change à nouveau le panorama. Le Grand Combin devant, le mont Blanc en toile de fond, le tout souligné par le rouge ferrugineux des barres voisines. Mille sept cents mètres de descente et une poignée de lacets plus bas, nous enjambons la gorge de Betendaz. L’arrêt au bar est plus que mérité.

Un fil d'Ariane

Ça ronfle sec dans les dortoirs de l’hospice du Grand-Saint-Bernard. À pas feutrés, six silhouettes se glissent dehors. Les chanoines, compréhensifs, nous ont préparé un petit déjeuner matinal. C’est qu’il reste du chemin à faire pour rallier le refuge Bonatti. L’ancienne voie romaine nous mène aux portes du vallon de Farcoz, où nous retrouvons nos habitudes montagnardes. Un mince sillon dans une pente à quarante degrés en guise de fil d’Ariane. Filtrant à travers les nuages, la lumière rasante magnifie les rides des immenses dalles de schiste qui nous entourent. La vue s’ouvre vers le col des Ceingles. Adouci par un ancien glacier, le fond du vallon contraste avec le haut relief, acéré à souhait.


À nouveau nous grimpons vers le passage pour mieux plonger vers la combe voisine. Un dernier col, et pas des moindres, ouvre l’ultime volet de notre parcours. Depuis Malatra et ses presque 3 000 mètres, les Grandes Jorasses exhibent leur majestueuse face sud. Le mont Blanc est drapé dans une gangue de nuages. Nous descendons nous mettre au chaud au refuge Bonatti, un lieu entièrement dédié au plus célèbre des grands alpinistes italiens. Walter Bonatti a signé quelques-unes des plus audacieuses voies sur ces géants de granit : pilier ouest des Drus, pilier central du Frêney…


Le « Hall of fame »

Le brouhaha du petit déjeuner surprend ceux qui s’étaient habitués à la solitude. Aujourd’hui notre chemin croise celui du Tour du Mont-Blanc. Nous mesurons le fossé de notoriété qui sépare ces deux itinéraires. Nous démarrons à contre-courant des autres groupes. Balcon verdoyant tout en contraste avec la sévérité granitique, le mont de la Saxe offre la plus belle des vues sur le « Hall of Fame » du massif du Mont-Blanc. Jorasses, Rochefort, Dent du Géant défilent jusqu’au refuge Bertone, dernière étape avant le plongeon vers Courmayeur. Un kilomètre en contrebas, les chalets cossus de la sœur jumelle de Chamonix annoncent l’imminence de notre arrivée.  



Texte et Photos Johannes Braun pour Alpes Magazine


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