Sortie du 9 août 2021 par François Lannes Chamousset versant nord-est : directe au cairn sud-est

Au Chamousset, l’année dernière avait été une vraie réussite : les Blandis, puis le Grand Couloir, et enfin la Directe au cairn sud-est s’étaient déroulés de façons quasi parfaites, et les souvenirs qui restaient de ces journées brillaient magnifiquement. J’avais très envie de continuer…

Itinéraire, carte // Fiche topo

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Conditions météo

Grand soleil, pas de nuage.

Récit de la sortie

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Au Chamousset, l’année dernière avait été une vraie réussite : les Blandis, puis le Grand Couloir, et enfin la Directe au cairn sud-est s’étaient déroulés de façons quasi parfaites, et les souvenirs qui restaient de ces journées brillaient magnifiquement. J’avais très envie de continuer…

Dans ce versant, l’imagination fertile faisait deviner d’autres cheminements envisageables. Sauf que, envisageables ne veut pas forcément dire faisables. Et d’ailleurs la tentative de juillet 2020 vers le cairn nord-est, bloquée par la raideur des lieux, était là pour en attester.
Titillé malgré tout par ce cheminement au cairn nord-est laissé en suspens, j’étudiais les solutions possibles pour en franchir les difficultés. C’est ainsi qu’un « contournement » prenait forme, et ouvrait la porte à une nouvelle tentative.

L’été 2021 fut surprenant.
À partir de la mi-juin, des journées nuageuses, des pluies régulières, empêchèrent de partir dans ces versants raides et herbeux qui nécessitent un temps sec afin de rendre les sols stables et non-glissants. Quelques créneaux de beau temps se sont présentés quand même, mais ils furent employés à d’autres projets. Et finalement, ce ne fut qu’après le début août que se proposait une météo adaptée.

Le samedi 07 août, sur Grenoble mais aussi sur toute l’Isère, la Savoie et la Haute-Savoie, un épisode pluvieux eut lieu qui fut surprenant par le volume d’eau qui dégringola. Pendant plus de trois heures, de véritables rincées sont tombées couvrant les rues de flaques immenses, gorgeant les sols d’une humidité complète. Mais, à la suite de ces pluies, Météo France annonçait des journées de soleil, pleines d’un grand soleil, comme on n’en avait plus vu depuis de trop nombreuses semaines.

J’étais impatient.
Choisissant donc de partir au Chamousset à ce moment-là, il fallait laisser passer le dimanche de beau, histoire de sécher l’atmosphère et les sols, et partir seulement le lundi. Grand beau temps !
Je comptais aussi sur le fait que, à Lus-la-Croix-haute, le climat aurait été meilleur qu’à Grenoble, avec moins de pluies… ??

La Jarjatte.
Très grand beau temps !
C’est parfait.
La voiture est stationnée sur la piste, après la fin du goudron, à la même place que l’année dernière.

Au bout d’un petit quart d’heure, il faut traverser le lit du ruisseau de Corps pour rejoindre à droite le vallon menant au versant nord-est du Chamousset. Tout va bien.
On doit alors remonter le lit d’un autre ruisseau, beaucoup plus petit.
Et là, la situation se dégrade : c’est la surprise complète, la mauvaise surprise ! Ce lit de pierrailles, qui avait été si facile, si commode, l’année dernière, est aujourd’hui complètement chamboulé ! Un vrai cataclysme s’est produit : toutes les pierres ont été retournées, poussées, giclées sur les bords ! Les racines des arbres ont été mises à nu, et le passage de l’eau a été incroyablement creusé : deux fois plus profond, peut-être même trois fois à certains endroits…
Je n’en reviens pas.

La conclusion qui s’impose est qu’avant-hier, samedi, ici aussi la pluie a été très forte et que, contrairement à ce que j’envisageais, les sols ne sont pas secs du tout. D’ailleurs, en de nombreux trous, stagnent des flaques de boue encore fraiche…
Malheur…

La remontée dans ce fond de ruisseau est bien moins commode qu’elle n’avait été, et il vaudrait mieux maintenant prendre la vieille piste de débardage qui se trouve à droite dans la forêt.

Plus haut, le « pierrier lugubre » est encore un peu humide, lui aussi.
Et, chose incroyable, un ravin de trois mètres de profond est apparu, semblant sorti de nulle part, qui coupe maintenant le pierrier en diagonale ! Ce ravin est la conséquence de ces pluies récentes, canalisées par le cirque rocheux d’en haut, et précipitées en cascade sur le flanc du pierrier, pierrier qui n’a pas résisté au choc, et cette longue cicatrice en est la preuve.
Je reste « baba » devant un tel changement de décor.

Le problème qui apparait maintenant est que tout est encore trop humide pour envisager, de façon sereine, le raide cheminement prévu. Je suis parti bien trop tôt : il aurait fallu patienter non pas un mais plusieurs jours supplémentaires avant de venir ici.

Continuant quand même à monter, le constat est net : si l’herbe de surface est à peu près sèche, la terre du sol en dessous est, elle, encore bien humide et se tasse à chaque pas sous les semelles. Quand la pente est facile, cela passe encore bien. Mais dès que la pente devient sérieuse, les chaussures glissent, les semelles se garnissent de terre meuble, et tout va dans le mauvais sens. Il faut évidemment prendre en compte cette situation, et devenir très prudent.

Le parcours projeté fait remonter le lit d’un autre ruisseau, au-dessus du « pré médian ». Ce ruisseau descend entre les falaises de la partie centrale du versant. Les eaux qui ont coulé là depuis des décennies ont mis à nu des plaques calcaires inclinées qui, aujourd’hui, sont couverte d’un drap d’eau. Sur les photos, cette raideur paraissait abordable, mais quand on est sur place, la chose est moins évidente : elle est même plus compliquée que prévue !

Il faut bien tenter quelques pas, presque de l’escalade, pour franchir le premier ressaut. Ça passe ! Le deuxième ressaut est plus haut, lui. Certaines pierres, qui auraient pu servir de prise de main, sont rendue instables par l’humidité de la terre dans laquelle elles sont enchâssées. Diable…
Je n’attendais pas la difficulté à ce stade, mais plus haut, dans la zone herbeuse raide. Si je bloque déjà ici, qu’en sera-t-il ensuite, sur un terrain exposé et dont le sol est instable… ???
À la réflexion, la réponse vient de suite : il ne faut pas y aller. Cela deviendrait dangereux.

Dans les topos rédigés à propos des vires et des randonnées du vertige, et au sujet des conditions de prudence pour les parcourir, j’ai toujours noté qu’il faut se méfier de la pluie, qu’il ne fallait pas se risquer sur ces vires si la pluie menaçait. Or aujourd’hui il fait grand beau, il n’y a aucun nuage. Il n’y a donc pas de risque de pluie, ni maintenant ni sous peu.
Et pourtant il ne faut pas y aller.

Avec mon projet du jour, c’est bien là qu’est l’erreur : il faut tenir compte aussi des pluies passées !
Avant de venir, j’avais laissé seulement un jour de marge après la dernière pluie. Or, compte tenu de la très forte quantité d’eau tombée, cela ne suffisait pas : il fallait laisser passer une semaine avant de venir…

Ne voulant pas descendre tout de suite, je louvoie dans la zone centrale, essaye de rejoindre à gauche la Directe au cairn sud-est, des fois que cela puisse être un lot de consolation. Mais non : tout est à l’identique, instable et piégeux.
D’ailleurs, sur une zone terreuse, je glisse et tombe brutalement, la fesse sur un caillou. Aïe ! Une douleur vive démarre aussitôt, comme un éclair, et je sens que le muscle est douloureux à l’effort. Bigre ! Déjà que depuis trois jours, un autre muscle, dans le dos celui-là, me faisait couiner aussi suivant la façon dont je me tourne.
Tout est décidément en train de virer de travers : les conditions du terrain, et la carcasse du bonhomme.
Il n’est que temps de descendre pour de bon. Et calmement !

Cela fait trois fois que je fais cette descente : dans le « pré médian », dans le « pierrier lugubre » : il y a ainsi un goût de familier qui est agréable. Voulant éviter le lit bouleversé du ruisseau inférieur, je coupe la fin du pierrier lugubre vers la gauche, puis entre dans la forêt et trouve rapidement la vieille piste de débardage. Elle devient vite très commode, et permet un retour confortable au ruisseau de Corps, et à la voiture.

Compte tenu de ce que sont les choses, telles qu’elles apparaissent maintenant, je ne suis plus sûr de revenir encore une fois dans ce versant nord-est du Chamousset. Oui. La difficulté technique des cheminements imaginés, repérés, et envisagés s’affirme être un cran plus haut que celle des premiers parcours réalisés, ceux de l’année dernière. C’est une difficulté que je n’ose pas franchir lorsque je suis en solitaire. Or c’est ainsi, tout seul, que je souhaitais mener à bien ces parcours.

Si j’avais été plus jeune, attendre une année de plus n’aurait pas été un problème. Peut-être même aurait-ce été un avantage, car l’expérience aurait pu s’accumuler et rendre les tentatives possibles. Mais je ne suis plus jeune…

Chaque année qui passe demande plus d’efforts, plus de préparation - physique et mentale – afin d’arriver à un résultat qui, malgré tous ces efforts, s’amoindrit sensiblement. Finies sont les années fastes de la jeunesse où l’on peut se lancer dans des aventures plus difficiles, plus fortes d’émotions, plus risquées aussi, sans que cela ne prête vraiment à conséquence.
Dans un récit précédent, ailleurs, j’avais décrit ce que j’appelais le « Grand Toboggan » de la vie du montagnard. Cette année-là, je croyais avoir atteint le point bas, et c’était il y a déjà 6 ans. Depuis j’ai pu faire encore quelques balades, certaines magnifiques, qui ont laissé d’intenses souvenirs.
Mais maintenant… ???

Descendant ces pentes du Chamousset, j’imprégnais la « boite à souvenirs » des images et des couleurs de tout ce versant, convaincu que c’était la dernière fois…
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Complément au topo initial :

De l’épingle de la piste forestière suivre la piste bucheronne sur 300 m qui longe le torrent de Corps. Repérer le cairn signalant le sentier des Gardes partant sur la droite.
Traverser le lit du torrent de Corps.

Continuer le sentier des Gardes sur l’autre rive. Au bout de 30 m, repérer à gauche un gros rocher cubique (2.5 m de côté) : la vieille piste de débardage commence ici, sur la gauche.

La suivre environ 15 min. Cette piste se détériore au fur et à mesure de la montée. Quand elle n’existe vraiment plus (deux blocs d’un mètre de haut comme repère), monter en légère diagonale à gauche sur 30 m pour déboucher au point bas du pierrier lugubre.

. Randonnée réalisée le 9 août 2021

. Dernière modification : 12 août 2021 (Avertissements et Droits d'auteur)

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  • Bonsoir François,
    A 100% avec toi sur le Grand Toboggan !
    Je connais bien cette sensation de descendre inexorablement (et nous sommes sans doute quelques-uns !), et comme toi j’en grappille encore un petit peu chaque année....Et on peut toujours se dire qu’on est toujours là, là où bien d’autres, plus jeunes, ne vont plus ou ne sont même jamais allés !
    Allez, on n’est pas foutu !!!
    Au plaisir...

    Le 12 août 2021 à 22h06
  • PS : et je fête mon "grand" âge aujourd’hui !

    Le 12 août 2021 à 22h08
  • Bonjour Vermatoiz,

    Merci pour tes mots de soutien et d’encouragement !

    Je sais bien que tout n’est pas foutu, et qu’il reste encore bien des choses à rérussir.
    J’irai aussi loin que raisonnablement possible car, comme tu l’écris : "on n’est pas foutus".

    Mais bon, le sens de l’évolution est donné, et il ne va pas changer pour autant......
    Il faut faire avec.
    Et le petit moment de déprime est maintenant passé.

    J’allume une bougie sur ton gâteau d’anniversaire,
    et ajoute une bise sur la joue
    (même si en période de covid, ils nous disent que ce ne serait pas recommandé.....).

    A la prochaine !

    Le 13 août 2021 à 13h52
  • Petit à petit on s’éloigne du youpala pour se rapprocher du déambulateur...

    Courage pense à Antoine Salvi qui bon gré mal gré profite encore de la nature.

    Bon anniversaire Nadine

    Le 13 août 2021 à 14h49
  • Il y a quelques années, en trainant du côté du vallon de la Petite Vaudaine, j’admirais la technique de ramasse d’un randonneur fort habile qui descendait du col de la Passure.
    Dans l’immense solitude de ce vallon , je l’ai attendu du côté de la cabane, histoire de papoter un brin. C’était un vieux monsieur de 79 ans, encore fringant qui habitait Livet. Les 1700m de dénivelé ne semblaient pas l’avoir entamé et je me souviens encore de son regard pétillant, de son sourire généreux, ravi comme un gamin. Je pense régulièrement à lui, comme. une sorte de phare lorsque le spleen du temps qui passe me prend.
    Tes récits haut en couleur François sont du même acabit. Il y a encore tant de choses à contempler, admirer, partager !
    Et joyeux anniversaire Nadine 🎂🥂 !

    Le 13 août 2021 à 20h25
  • Ah ben alors bon anniversaire Nadine👍👍👍

    Le 13 août 2021 à 20h33
  • Merci à tous ! C’était un clin d’oeil mais vos voeux me touchent....Merci Patrice, Fmc, Joëlle et François !

    Le 13 août 2021 à 23h10
  • Bonjour,

    @ galipette,

    Tu as raison !
    On s’éloigne du youpala...

    Quant au déambulaterur, j’ai constaté le problème qu’il pose.
    Le problème c’est son poids, quand la pente devient raide et qu"on doit le mettre sur le sac à dos.... !
    Du coup, je ne le prends plus avec moi dans ces balades-là.

    @ Forêts-myrtilles-et-caillasse,

    Merci pour "les récits hauts-en-couleur".
    Cela rassure de contater que ces paragraphes plaisent quand même...

    Mais j’ai lu les tiens, et je peux te dire que je les apprécie beaucoup aussi.

    Quant à tes photos, j’ai maintenant pris un abonnement pour les regarder chaque fois qu’elles seront parues.
    J’attends donc !
    Avec quelque impatience....

    .

    Le 14 août 2021 à 10h11
  • J’ai loupé cette sortie... bien trop occupé cet été !

    Les aventures à Durbonas ont bien contrecarré ton Grand Toboggan ! Un coup de moins bien ça arrive même à nous les plus jeunes !
    Pour sûr que ce ne sera pas la dernière à Chamousset... Il reste Côte Plane à explorer !

    En tout cas merci à toi d’être passé me voir. Au plaisir !

    Le 4 septembre 2021 à 16h24
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