Sortie du 15 août 2022 par Valentin Ayela Pic du Glacier d’Arsine (3364m)

Nuageux avec des éclaircies

Le Pic d’Arsine. C’est un sommet qui m’a longtemps laissé dans l’indifférence la plus totale. Jusqu’au jour où je suis tombé sur la story instagram d’un gars qui l’avait gravi sans aucun matos. En le questionnant au sujet de l’ascension, il m’a expliqué qu’en cette malheureuse année 2022, il était possible de grimper sans aucun matériel d’alpinisme, hormis un casque à la rigueur./

La première partie de l’ascension m’est si familière. Je connais parfaitement le chemin menant au refuge du glacier Blanc.

Le constat est sans appel : les glaciers qui nous entourent sont gravement malades.

Triste année 2022...

L’objectif est long. Du refuge, que l’on atteint en moins de 2h, il faut rejoindre le sentier d’alpinisme menant au refuge des Écrins. Il est rapidement balisé de points blancs et de cairns (certains ne sont pas évidents).

Le glacier Blanc est dans un état lamentable, c’est effrayant. Je suis venu ici, il y a seulement 2 ans, et l’écart est phénoménal. La Barre quant à elle, commence à pointer le bout de son nez, bien maigre elle aussi.

On se dirige vers la droite, direction le Pic d’Arsine. Je reconnais qu’un sens de l’orientation et de l’observation s’impose. Il faut se baser sur les cairns qui ne sont pas toujours visibles.
Arrive le dernier replat avant l’ascension finale et... il n’y a rien. Pas une trace de neige. Aucun névé. Les pierres sont très instables.

Mais pour le reste du matos, il aurait bien été inutile en effet...

Le final est impressionnant, mais j’ai personnellement adoré. C’est glissant, nous avons croisé un groupe "d’alpinistes" qui nous ont décrit un début un peu chaud. Mais bon, c’est un milieu en grande évolution avec le réchauffement.
La toute fin m’a beaucoup plu. Mes deux collègues hésitaient un peu plus.
Il suffit de suivre les cairns et de mettre les mains où nous le sentons. Avec du recul, c’est de la bonne escalade comparée à bien d’autres montagnes, comme le final du Galibier par exemple.
Et ce sommet...

C’est une déferlante de grands noms en plein cœur des Écrins. Nous commençons par les géants : Meije, Barre, Pelvoux, Ailefroide... Puis le Goléon et les Aiguilles d’Arves plus loin. Il y a les Cerces aussi et soyons fous, le Mont Blanc par-dessus. Les lacs du glacier d’Arsine nous interpellent sous nos pieds. Il y a tant d’autres noms comme le Combeynot, le Thabor, les Agneaux, la Font Sancte encore plus loin...

Le Pic d’Arsine nous plonge sans grande difficulté au cœur des Écrins, et principalement au cœur du changement climatique. En observant attentivement ces géants de pierre et de glace, je me dis que si nous pouvions les écouter, ils nous raconteraient beaucoup de belles histoires certes, mais aussi leur terrible agonie avant de s’endormir à jamais...
De toutes les montagnes que j’ai gravies, c’est à ce jour le Pic d’Arsine qui m’en a le plus dévoilé sur la fonte des glaciers. C’est marrant quand j’y pense. C’est cette sècheresse qui m’a poussé à réaliser son ascension. Il siège peut-être au banquet des plus tristes reflets du changement climatique.

Pour un sommet improvisé à la dernière minute, c’est un sacré phénomène. Je recommande ! Nous regrettons seulement les casques, qui auraient pu nous assurer une protection supplémentaire en cas de chute de pierres dans l’ascension finale.

Je profite de ce post pour adresser une pensée à d’autres lieux magnifiques comme le Verdon, les grands lacs tels que Serre Ponçon ou Sainte Croix, ou encore la forêt de la Dune du Pilat, victimes également de cette sècheresse en 2022.