Sortie du 22 mars 2024 par CourtePatte Montagne de Beynes (1601m) en boucle par Beynes

La Montagne de Beynes... avec une variante que je ne recommanderai à personne !

Itinéraire, carte // Fiche topo

Topo de référence

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Conditions météo

Grand beau, presque chaud.

Récit de la sortie

J’étais bien décidée à compléter une merveilleuse balade dans les Gorges du Trévans par l’ascension de la Montagne de Beynes toute proche.

En sortant, sur la route de Majastre, du sentier balisé des ruines de Saint-André, l’itinéraire était tout trouvé : il m’aurait suffi d’enfiler la piste du Jas de Guigou pour retomber sur le PR qui mène à la crête. Mais ça c’est pour les chochottes. Ça me paraît un grand détour, et puis j’ai mon idée : après le Pont du pas d’Escale je vais passer par le vallon à l’est de la Montagne de Beynes, que j’ai baptisé "vallon des Senières" du nom des ruines qui s’y trouvent. Moyennant un peu de hors-sentier, je me fais forte de rattraper la sente oblique, décrite dans cet autre topo, qui rejoint l’itinéraire balisé sur la crête.
J’ai bien regardé carte et photos aériennes. C’est un pays de buis, il m’y faudra un peu de bartasse, rien de bien effrayant.

Ah la brillante idée que j’ai eue là.

Pourtant, ça se présente bien. Passé l’embranchement pour la ferme de Preynes, je trouve une sente discrète qui s’enfonce dans le vallon. C’est parfait !
Et puis, ça se complique. Rapidement la végétation s’épaissit et se dresse. La sente s’est évanouie, bue par les buis qui sont désormais plus hauts que moi. Pire encore, certains d’entre eux, probablement vaincus par la pyrale, sont des balais de bois mort qui ont perdu toute leur souplesse ; je ne peux plus les écarter de la main, et je peine à me faufiler entre ces branchages.

Tiens ? Un chamois qui détale au milieu des fourrés. Manifestement il est encore jeune ; il s’arrête et m’envisage, comme pour me demander quelque chose. Je comprendrai par la suite, en voyant une petite harde passer à distance, qu’il devait chercher sa famille ; car un peu plus tard, au bruit que je fais dans les fourrés, il revient au grand galop vers moi - pour s’immobiliser net en constatant que décidément je ne suis pas celle qu’il attendait.

C’est bien l’unique surprise agréable que j’aurai avant un grand moment. Car la végétation s’épaissit encore ; désormais il y a des trucs épineux, des fourrés inextricables - et je suis en short ! Tant pis, j’ai la flemme de ré-enfiler mes jambes de pantalon, et puis de toutes façons j’ai déjà les mollets lacérés.

La suite, tous ceux qui se sont un jour fourvoyés dans un itinéraire de sanglier la connaissent. Je cherche ma sente élusive encore un petit moment, et lorsque je décide que je ne la trouverai pas, je n’ai plus du tout envie de faire demi-tour dans cette jungle. Alors je prends au cap dans la pente, et bien sûr le terrain est encore pire. Aux buis et aux prunelliers s’ajoutent maintenant des pins à branches basses sous lesquels il me faut ramper, et d’où dégringole à chaque fois une douche d’aiguilles sèches et de débris ; j’en ai dans le tee-shirt, dans les poches et jusque dans le sac à dos.
Et cela n’en finit pas. J’emprunte toutes les sentes de sanglier que je croise : les sangliers, comme moi, tendent à éviter les fourrés trop épineux. La végétation est tellement dense que souvent je ne touche pas le sol, je marche carrément à l’intérieur des buis. Je n’ai pas encore déjeuné - je me réservais de faire un pique-nique tardif sur la crête ; j’ai faim, je m’adresse mille malédictions intérieures, et le jour baisse. Je ne vais tout de même pas me retrouver prise par la nuit au milieu de ce, euh, purgatoire ?

Tout de même pas. Après deux heures, deux heures qui valaient une éternité, je débouche soudain sur le fil clair d’un sentier, un vrai ! étroit mais parfaitement dessiné : c’est la sente que je comptais rattraper, celle du topo de la Font d’Isnard. Et là encore, certains comprendront le soulagement et le plaisir avec lequel je fais, depuis deux heures, mes premiers pas sans rencontrer aucun obstacle. Oh, le luxe de pouvoir cheminer en levant le nez pour contempler les vues.

Reste que je commence à être un peu fatiguée, et qu’il me faut puiser dans mes réserves pour me hisser jusqu’au sommet. Alors, arrivée là-haut, c’est la fête. Et que je sors enfin le pique-nique - à 18h passées -, et que je me régale des vues : Chiran, Montagne de Lure, Barre des Dourbes et Cheval Blanc, et la frise enneigée des sommets du Haut-Verdon et du Mercantour.
C’est superbe. Il me faudra sûrement redescendre à la frontale - prions pour que le sentier de Beynes soit bien lisible -, mais pour ce prix-là j’ai droit aux éclairages du crépuscule qui font rosir tous les sommets à l’est. Lorsque j’amorce la redescente les cimes enneigées ont pris, dans l’heure bleue, cette étrange phosphorescence un peu poignante qui ne dure pas ; déjà les couleurs se brouillent.

Dieu merci, le sentier de Beynes est à peu près lisible. Je lui reprocherai seulement une certaine quantité d’arbres couchés en travers : dans la pénombre, la masse des branches me donne à chaque fois l’impression de m’être à nouveau fourvoyée ("Ah non ! ça ne va pas recommencer !"), et le balisage n’est pas exactement verbeux ; mais à chaque fois je devine la suite du sentier au-delà de l’obstacle.

La nuit m’enveloppe bien avant que je retrouve l’embranchement de la piste forestière de Saint-Pierre, sur laquelle je compte pour redescendre jusqu’à la Clue de Chabrières. Bien sûr j’ai raté le dernier bus pour rentrer à Digne, et l’aventure n’est pas encore tout à fait finie ; mais ça ne fait rien. Cette Montagne de Beynes en valait la peine !

. Randonnée réalisée le 22 mars

. Dernière modification : 25 mars 2024 (Avertissements et Droits d'auteur)

Auteur :

Réagissez !

  • Et bien, quelle épopée ! On se régale à te lire et on partage ta galère....qui rappelle quelques souvenirs à certain(e)s....

    Le 25 mars à 21h48
  • Re-bonjour CourtePatte,
    J’ai commencé la lecture par ce récit, sans avoir réalisé qu’il faisait suite à celui-là :
    https://www.altituderando.com/rando24297
    Aussi ne comprenais-je pas tout de comment s’était organisée ta journée de marche...
    Après quelques recherches, j’ai finalement eu le fin mot de l’affaire. Bref !
    .
    Ton récit, ou (en sous-titre) : "Comment faire pour donner du goût à une fin de journée commencée tout tranquillement ?"
    .
    Visiblement il faut être prudent lors de la préparation d’un cheminement hors-sentier dans cette région au climat déjà méditerranéen. J’ai fait comme toi et ai regardé les photos aériennes. Ton idée paraissait pourtant tout bien !
    Comme quoi, entre la théorie et le terrain...
    .
    Merci pour la narration faite sur un ton si humoristique qu’on pourrait croire que le "piège" n’était pas tant grave. Ce qui n’était en fait pas le cas. Mais, en tant que lecteur, on redemande de ce genre d’aventure, bien sûr pour le plaisir de te lire ensuite !
    A bientôt donc !

    Le 26 mars à 11h00
  • Merci à tous les deux ! Oui, c’est le genre d’itinéraire qui laisse des souvenirs...pas que dans la tête d’ailleurs. Mes jambes et mes bras en sont encore calligraphiés.
    A chaque fois que je me retrouve dans ce type de terrain, il me vient un profond respect pour les gens qui marchent dans la jungle, la vraie ! pendant des journées entières, avec en plus un tas de bestioles qui piquent et qui mordent. Je ne sais pas comment ils font.

    Le 26 mars à 12h46
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