Sortie du 16 juin 2018 par patrick73 Cime du Sambuis (2734m)

Belledonne et en particulier la combe de la Croix est énormément enneigée !

Enneigement quasiment continu dès 1900m avec quelques passages herbeux et rocheux.

Les 70 derniers mètres sont secs, et se montent par les sentes en pierraille raide.
La pente sommitale fait 150m environs à 35° en neige.

Grand beau temps le matin à 6h, et doux.
Premiers nuages vers 7h, puis cumulus qui jouent à cache-cache avec les sommets.

Chaud au soleil, frais quand il est caché !

Pas de regel nocturne, trace de sanglier à faire à la montée et la descente (bonne fatigue !), crampons bien utiles pour accrocher un peu quand même !

Départ de sous le col d’en haut 6h

Plan des 3 eaux (combe de la croix- 2130m) 7h15

Passage des barres 2300m 8h15 (crampons utiles dans la traversée de deux couloirs expo)

Lac 2500m sous la pente sommitale 9h30 (trace de sanglier dans de la neige semoule)

Sommet 2730 10h45 (la pente est en neige molle, on a fait une tranchée)

Sieste jusqu’à 11h45

Retour à sous le col d’en haut 13h45 (descente grand confort en neige molle voir profonde !)

Pointe de Sambuis, voie normale, 16-Juin- 2018

Le nouveau monde.

6h ce matin-là. Le jour est déjà levé et depuis longtemps. Nous sommes à quelques jours du solstice d’été.

Ce petit matin est frais et clair. Quelques nuées trainent en fond de vallée, déjà des bancs de nuages se montrent sur les sommets.

L’ambiance est lourde et humide, la rosée perle sur cette herbe grasse des pentes boueuses du col du Glandon.

Tarines et Abondances n’ont pas encore envahi l’alpage de sous le col d’en haut, les fleurs éclosent seulement, quelques touches de fuchsia des premiers rhododendrons, promesse d’un Beaufort d’alpage riche et goûtu !

Derrière le Grand Coin, de l’autre coté de la vallée, dans les Encombres, quelque chose se prépare.

Je le ressens dans tout mon être.
La nature semble s’être soudain arrêté de vivre quelques instants. L’instant est lourd, l’instant est immobile.

Les brises matinales se sont tues.
Pas un brin d’herbe ne bouge. La rosée reste comme figée par un coup de gèle sur les feuilles. Plus une goutte ne semble vouloir quitter son fragile équilibre.

Je m’arrête aussi de marcher. Pourtant il n’y a que quelques instants que nous commençons à grimper le raide sentier qu’inondent les ruisseaux gorgés d’eau de fonte.

C’est presque imperceptible. Mais en un très court instant le monde semble basculer. Les couleurs grises ternes, presque uniformes des aiguilles qui nous dominent se teintent.
L’aiguille de Cros massive et trapue, presque ratatinée tellement elle nous écrase, se redresse, se pare de teintes chaudes, rosées puis orangées, et c’est l’enflammement.

Là bas derrière le Grand Coin, dans les Encombres, l’incendie couve.
Une explosion se prépare. L’air frémit sur les crêtes, la lumière tremblote, puis vibre.

À l’unisson la nature rentre en résonance, et se prépare au grand chamboulement.

D’un coup d’un seul, un point lumineux d’une incroyable intensité nous frappe avec une brutalité fulgurante. J’ai l’impression d’être transpercé !

L’immensité de la montagne vibre, se dilate, le temps s’accélère, une boule de feu dorée explose derrière la montagne et repend sa douceur dans notre bulle d’univers.

Le soleil vient de se lever, l’oppressante attente s’est dissipée, la vie comme suspendue reprend son cours lent et régulier. Le temps s’écoule à nouveau.