Sortie du 28 octobre 2017 par Thierry GARCIN Le Massour ou Buc de Nubiera (3219m)

En haute Ubaye, au départ du hameau de Fouillouse, une superbe randonnée sur deux jours, dont une nuit mémorable au sommet du Massour dans le refuge-bivouac italien "Renato Montaldo", et, le deuxième jour, un crochet distrayant par le Pas de la Couletta avec sa vue imprenable sur le refuge du Chambeyron et son Lac Premier puis, pour conclure, le Lac des Neuf Couleurs. Sommet assez méconnu, situé sur la ligne de crête du Brec de Chambeyron (3389m), Le Massour (3219m) est une randonnée très physique qui procure de belles sensations alpines dans un isolement total méritant une excursion.

Itinéraire, carte // Fiche topo

Topo de référence

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Conditions météo

Terrain sec, froid vif et accentué par le lever du vent du Nord en rafales en fin d’après-midi, durant toute la nuit et jusqu’au lendemain.

Récit de la sortie

Accès

De Barcelonnette (Alpes-de-Haute-Provence), prendre direction de Jausiers, La Condamine-Châtelard, Col de Larche et Col de Vars puis, au niveau de Fort de Tournoux, laisser la route menant au Col de Larches et l’Italie pour prendre, à gauche, la route D902 en direction de Saint-Paul-sur-Ubaye et du Col de Vars. A Saint-Paul-sur-Ubaye, prendre à droite à l’entrée du village, la D25, petite route menant à Maljasset. Dans l’amorce de la haute vallée, toujours sur la D25, à une intersection, prendre à droite, la route étroite et sinueuse menant au hameau de Fouillouse. Parking obligatoire à l’entrée du hameau.

Précision sur la difficulté

LE PREMIER JOUR

La seule difficulté sera physique et se concentre le premier jour puisque elle concerne l’ascension du Massour, surtout avec le sac chargé pour le bivouac, à savoir :

  • Approche du Massour, en versant Ouest, dans une combe pierreuse au départ de l’alpage, contournement par la gauche d’une barre rocheuse et traversée d’un pierrier supérieur longeant le socle rocheux de l’arête sommitale, et, enfin, pente finale permettant d’accéder au sommet du Massour avoisinant les 40 degrés dans un bref couloir terro-pierreux dérapant nécessitant des cuisses solides comme de bons appuis avec, chutes de pierres toujours possibles en cas de cordée en dessus - passage donc potentiellement dangereux.
  • Certes courte, cette partie finale d’ascension du Massour dans un bref couloir terro-pierreux donnant sur une rampe sera de loin la plus exigeante et, éventuellement, impressionnante pour les personnes impressionnables (j’en suis parfois, selon la sortie et les frayeurs inopinées…) ou, en tout cas, peu habituées à de telles déclivités. D’ailleurs, vu la pente et préférant me concentrer sur mes appuis, je n’ai pas sorti mon appareil photo. C’est un passage obligatoire.
    A moins de passer par la droite, ce qui est possible en contournant un rognon rocheux de mi-pente, accessible depuis le pied du couloir, puis par une vire ascendante se rétrécissant en fissure assez large pour les pieds, rejoindre une dalle compacte parcourue par une fissure moyennement facile à escalader (un bon III+ exposé et assez vertical) qui donne sur un à-pic d’environ 150m de haut, versant Sud (donc côté Col de Stroppia), et permet d’accéder à la rampe de sortie du couloir menant au sommet. Une chute y serait fatale. Évidemment la descente par là n’étant possible qu’en rappel ou en désescalade délicate, la descente se ferait de toute façon plutôt par le couloir terro-pierreux.

En cas de fort vent en rafales (ce qui fut mon cas), la rampe d’accès au sommet peut provoquer des frayeurs... Cette rampe bordée au Sud d’un à-pic à la sortie du couloir part ensuite sur la gauche (plein Nord) par une sente dans un petit pierrier sous-sommital surplombant le couloir.

Évidemment, savoir s’orienter et lire une carte, tout comme jauger de la topographie seront une nécessité. Quoique l’itinéraire se devine aisément, mieux vaut quand même avoir des notions de topographies. Aucun balisage, hormis quelques cairns sur le tracé marqué çà et là par des passages de pieds. Mais rien de sorcier tant l’itinéraire par temps clair et vu d’en-bas est évident et se dévoile au fur et à mesure de l’ascension. Toutefois, s’y engager par temps de brouillard serait aléatoire.

LE DEUXIÈME JOUR

Le reste de la randonnée le deuxième jour, sur sentier balisé, sera fort plaisante et presque plate et enfantine au regard du premier jour à l’assaut du Massour.

Les infos essentielles

  • Carte IGN TOP25 3538ET (Aiguille de Chambeyron – Cols de Larche et de Vars)
  • Altitude départ : Fouillouse (1900m)
  • Altitude maximale : Le Massour (3219m)
  • Dénivelé total cumulé : 1971m (soit : le 1er jour 1320m, le 2e jour 651m)
  • Distance : environ 23km (soit : le 1er jour 7,5km, le 2e jour 15,5km)
  • Durée : 2 jours (2 étapes selon le rythme propre à chacun. Quant à la première étape, celle du Massour, prévoir entre 3h30 à 5h00 de montée, selon la condition physique de chacun et le poids du sac).
  • Matériel nécessaire : bâtons de marche, piolet (fort utile même sans neige, pour tailler des marches ou s’ancrer dans la pente raide terro-caillouteuse finale, sous le sommet), casque utile (notamment en cas de randonneur en-dessus dans le couloir), carte et compas, altimètre, vêtements couvrants de haute montagne, nécessaire de bivouac (duvet haut de gamme basses températures) + eau en quantité suffisante (pas d’eau au sommet), en cas d’accident : téléphone cellulaire (le réseau italien passe assez bien).
  • Le refuge-bivouac « Renato Montaldo » est équipé pour quatre couchages (matelas et couvertures). Attention cependant, si la carapace métallique de l’abri-bivouac protège du vent glacial, en revanche l’intérieur n’en est pas moins un véritable frigo : ce fut mon cas lors de ma rando le 28 octobre 2017. De plus le vent était si fort durant la nuit que je sentais parfois l’abri (maintenu par des câbles) bouger sous les rafales et n’étais pas vraiment rassuré… Une nuit en pointillé, donc…
  • Question cartographique : une erreur de positionnement existe sur la carte IGN (papier) TOP25 3538ET. En effet, sur celle-ci, le Massour est marqué à proximité du point coté 3024, en bout d’arête Sud dominant le Col de Stroppia, alors que le Massour est bel et bien situé au point coté 3219, donc plus au nord sur l’arête. Cette erreur a été rectifiée depuis (et je suppose prise en compte pour l’édition de la nouvelle carte papier), notamment sur géoportail où la carte en ligne fait apparaître Le Massour au bon endroit. De même son refuge-bivouac y est mentionné par un pictogramme.

Itinéraire / récit

AVANT-PROPROS

Ce sommet mérite vraiment le détour, à condition d’y aller hors saison si l’on privilégie de n’y rencontrer personne pour apprécier le silence. Y passer seul une nuit dans son refuge-bivouac « Renato Montaldo » niché juste sous la croix sommitale convoque les pensées les plus nobles et intimes. Là, de ce perchoir sur les hautes cimes et au contact des éléments – pour moi ce fut le vent froid en bourrasques et l’embrasement du ciel au couchant – dans sa solitude l’on prend conscience de la Beauté du monde et de l’éphémère que nous sommes. D’ailleurs, au départ de Fouillouse, l’inscription au fronton de son petit cimetière est là pour nous le rappeler : « Passants souvenez-vous que nous avons été ce vous êtes et qu’un jour vous serez ce nous sommes ». Alors le cœur s’ouvre à la modestie…

Dans ce petit cimetière se trouve le caveau de la famille Grouès. Fouillouse, en effet, est le berceau de cette famille rendue célèbre par l’Abbé Pierre, de son vrai nom Henri Grouès - son père parti de la haute vallée pour Lyon avec sa mère (elle, de Tarare) lui donneront le jour en 1912 dans l’ancienne capitale des Gaules. Les grands-parents de l’abbé Pierre y reposent.

ITINERAIRE GENERAL

PREMIER JOUR

Du parking, traverser le hameau de Fouillouse par la route devenant vite une piste. Laisser sur sa droite la piste traversant un gué et le sentier attenant menant après séparation au col de Mirandol.

Poursuivre en rive gauche du Riou de Fouillouse (devenant plus loin, en montant, Riou du Vallon et Riou des Aoupets) sur le large sentier GR5-GR56 (et GRP « Tour du Chambeyron » balisé comme il se doit en rouge et jaune).

A la première bifurcation, au niveau des ruines du Fort de Plate Lombarde, laisser le GR5-GR56 à droite en direction du Col du Vallonet et poursuivre sur le sentier partant sur la gauche en direction du Col de Stroppia. De là se dessinent, plein Est, les hauts du Massour, au Sud-Ouest du Vallon de Plate Lombarde l’enfilade de sommets chacun appelé « Tête de… » formant une muraille bordée par la Combe du Pré au-dessus de l’à-Pic, plus au loin au Sud-Est, délimitant la frontière franco-italienne, la belle pointe de Rocca Blanca (3193m).

L’on parvient guère plus loin à une intersection : à gauche le sentier part en direction du Pas de la Couletta, tout droit il continue en direction du Col de Stroppia. Poursuivre tout droit sur environ une centaine de mètres vers le Col de Stroppia.

Quitter le sentier balisé en direction plein Est, donc sur la gauche. Avec, comme repère sur le terrain, un beau rocher planté dans la pelouse, et mettre le cap légèrement à gauche du point coté 2506 (sur la carte IGN). Gravir une pente herbeuse formant une bosse. En fait, il faut s’orienter à l’estime pour passer entre, à droite, le point coté 2506, à gauche « Vallon des Aoupets », tous deux marqués sur la carte IGN.

Toujours en montant plein Est, tenter de repérer un premier cairn indiquant la direction à suivre. Si on le rate rien de grave, car dès le sommet de cette bosse on aperçoit l’intégralité du raide ravin terro-pierreux d’accès au Massour. A partir d’ici, l’itinéraire se dévoile sans surprise au fur et à mesure de l’ascension.

  • Attention : le ravin à gravir n’est pas celui à gauche du nom « Le Massour » marqué dessus le point coté 3024 sur la carte IGN - ou du moins sur la vieille carte IGN. Le ravin à gravir est l’autre immédiatement après, donc plus au Nord, marqué dans la pente du point coté 2701 sur la carte IGN. En revanche, sur géoportail, Le Massour est bien marqué au bon endroit, c’est à dire sous le sommet culminant à 3219m. De même, l’abri-bivouac y apparaît. Cette rectification en ligne sera vraisemblablement prise en compte par l’IGN pour l’édition de la nouvelle carte TOP25 3538ET - à moins que cela ne fût déjà fait. Personnellement, possédant l’ancienne carte, je n’en sais rien.

Viser ce ravin en cheminant au mieux, à travers pelouses et blocs de rocher éparses. Au pied du ravin, le gravir le plus à droite possible en visant la droite du point coté 2701 (marqué sur la carte IGN) en son centre – donc en ayant la majeure partie du ravin à main gauche, par une succession de zigzags et de raidillons pénibles. Çà et là quelques cairns jalonnent la montée et une vague sente qui se perd parfois mais dont on devine le cheminement. Ce ravin est pentu et son ascension vraiment très physique, a fortiori si le sac est chargé.

L’on débouche sur un vaste replat chaotique constitué d’un champ de vagues d’éboulis surplombé :

  • au Nord-Ouest (donc sur sa gauche, légèrement dans le dos) d’une paroi formant la base d’un énorme rognon rocheux,
  • à l’Est (donc face à soi) par un entonnoir d’éboulis surplombé par une barre rocheuse verrouillant un petit cirque rocheux.

Grimper avec à main gauche cette paroi rocheuse orientée Nord-Ouest, en suivant les nombreux cairns dorénavant présents. Prendre pied sur la gauche sur une sorte de large arrête pierreuse (viser le point coté 2945 sur la carte IGN sans l’atteindre cependant) où la sente cairnée avec ses traces de pieds sinue entre les blocs de toutes tailles, dont certains branlants. La remonter plein Est afin de contourner par un vaste pierrier en arc-de-cercle la barre rocheuse verrouillant le petit cirque rocheux vu d’en-bas. Ce qui fait que l’on se retrouve à marcher plein Sud en direction du couloir d’ascension finale immanquable, lui orienté plein Est, et que l’on va par conséquent découvrir sur notre gauche.

Ce couloir moyennement large à sa base se rétrécit au fur et à mesure que l’on monte par une vague sente jusqu’à ce que l’inclinaison de la pente terro-pierreuse devienne très raide et de moins en moins adhérente. Le risque de dérapage comme de dévaler en bas du couloir n’étant pas à exclure, ne pas hésiter à sortir le piolet (si on l’a emporté) pour planter la lame ou tailler des marches si nécessaire et se sentir plus en sécurité. Les traces de passage et de dérapage y étant nombreux, prendre à l’estime l’itinéraire le plus sain, en cherchant les meilleurs appuis possibles parmi les petits rochers émergeant de terre çà et là n’est pas si facile et se fait, si je puis dire, au petit bonheur la chance.

Parvenu en haut du couloir où la déclivité de la pente se calme, se déporter sur la droite pour rejoindre une courte rampe bordée d’un à-pic donnant plein Sud, laquelle mène à un petit pierrier sous-sommital (surplombant le couloir que l’on vient de gravir) traversé par une sente et qui conduit plein Nord au joli refuge-bivouac « Renato Montaldo », et de-là au sommet immédiatement en-dessus avec sa croix (3219m).

La vue y est somptueuse sur les sommets environnants et, au loin, tout en bas, Fouillouse et les quelques hameaux de la vallée de l’Ubaye, dont les lumières dès la nuit tombée sont le seul témoignage de vie.

La descente se fera par le même itinéraire, en choisissant les portions les plus empierrées pour limiter les dérapages dans la section pentue du couloir.

DEUXIÈME JOUR

Ce deuxième jour est facultatif. Mais plutôt que de redescendre directement à Fouillouse, et afin de conserver encore un peu en moi de cette sensationnelle immersion dans la nuit au sommet du Massour, j’ai trouvé plus ludique et dégressif de faire ce crochet jusqu’au Lac des Neufs Couleurs.

La Descente du Massour terminée, du pied du ravin remonter en traversant plein Nord par les pierriers puis les pelouses parsemées de blocs le charmant Vallon des Aoupets jusqu’à rattraper le sentier en direction du Pas de la Couletta (2752m). Au Pas de la Couletta, la vue sur le refuge du Chambeyron et son Lac Premier y est fort belle (un sentier y descend).

Poursuivre quasiment plein Nord en direction du Lac Long, par une sente bien marquée à travers un chaos de blocs de toutes tailles longeant la Corniche Jean Coste et le Brec de Chambeyron. Au Lac long, poursuivre par le sentier très roulant plein Est en direction du Col de la Gypière. 500m de distance avant le col, une sente se sépare du sentier et descend en quelques 250m de distance (et non pas de dénivelé) au bord du très beau Lac des Neufs Couleurs logé au fond d’une cuvette et encerclé de sommets distinctifs : Aiguille de Chambeyron (3412m), Pointe des Cirques, Brec de l’Homme, Pointe du Fond de Chambeyron et Tête de la Fréma.

Possibilité également de monter en un clin d’œil jusqu’au Col de la Gypière (2927m), frontalier de l’Italie avec une vue sur le refuge Barenghi, situé non loin en-dessous du col. Du Col de la Gypière, possibilité également de monter sans gros efforts en quelques petites minutes au sommet de la Tête de la Fréma (3151m) par une sente bien marquée sans danger ni difficulté, en partie en arête, en partie en versant Nord. Ce tout petit sommet qui tient davantage de la dent offre une vue panoramique sur le Lac des Neufs Couleurs et le versant Sud de la massive Aiguille de Chambeyron.

La descente se fait par le même itinéraire jusqu’au Lac Long. De-là, poursuivre en direction du refuge du Chambeyron (2626m) puis jusqu’à Fouillouse par un large sentier fort plaisant, traversant des mélèzes à la robe ocre et or à l’automne. Un enchantement.

. Randonnée réalisée le 28 octobre 2017

. Dernière modification : 11 octobre 2021 (Avertissements et Droits d'auteur)

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