Sortie du 28 juin 2022 par Valentin Ayela Castor (4228m)

Bonnes sur l’ascension, pas terribles à la descente (neige).

En 2022, j’avais prévu de faire mon premier 4000 : le Grand Paradis.
Mais deux semaines avant le départ, l’objectif a drastiquement évolué.

Le plan était simple : se rendre en Italie pour faire une partie des 4000 du Mont Rose.

La liste :

• le Castor
• la Naso del Lyskamm
• la Pyramide Vincent
• la Parrotspitze

Place au Castor.

Avec mes deux "guides" JJ et Roland, nous partons de Gressoney (Stafal). Nous ne sommes pas vraiment dépaysés car dans ce coin de l’Italie (Val d’Aoste), le français est couramment parlé. Les panneaux par exemple sont souvent indiqués en français, et les noms des communes ou même de certaines montagnes sont également en français.

Nous prenons le télésiège, puis place à l’ascension jusqu’au refuge. Pas grand-chose à écrire à ce propos. C’est grand, c’est vaste. Tout parait plus haut que d’habitude.
Nous rencontrons un bouquetin peu farouche avec lequel nous progressons durant une bonne demi-heure. Il marche avec nous, et il est plutôt photogénique. C’est fantastique. Quel beau souvenir que tu me donnes mon vieil ami...

L’ascension finale pour accéder au refuge Sella est plaisante. Des mains courantes sont posées tout le long. C’est escarpé, c’est aérien, c’est une belle petite crête rocheuse.

Le refuge est grand. Le cadre est sublime. Il y a tellement de glaciers, c’est grandiose. Mais la vue sur le glacier Felik est malheureuse. Nous ne sommes qu’en juin et les conditions sont similaires à une fin août...

Le lendemain, c’est le départ pour mon premier 4000. C’est aussi et seulement la deuxième fois que je chausse les crampons.

Nous progressons doucement sur ce glacier à l’agonie jusqu’à atteindre une partie enneigée, assez pénible à traverser. Une première pente (je dirai à 35°) nous accueille vers les 4000m, avant le col. Elle ne m’a pas laissé un bon souvenir, car c’était sec, et donc difficile à gravir avec les crampons pour un débutant comme moi.

Nous arrivons au col Felik. Ce col nous délivre un bel aperçu des Alpes pennines. Direction le Castor à gauche. Une dernière pente nous mène au final, sur la légendaire crête du Castor. J’ai eu peur sur le coup en arrivant au départ du parcours. C’est impressionnant, mais pas si redoutable. J’ai rarement été aussi concentré en marchant en montagne. La dernière fois remonte à l’an passé dans le couloir caché de la Grande Ruine. La neige reste dure et c’est agréable, peut être grâce au vent qui nous accompagnait. Et nous voilà au sommet, à 4223m !

En fin de compte, c’est une expérience magnifique. A cet instant, je ne suis plus sur la Terre des hommes. Me revoilà dans le monde d’en haut, ici où la vie n’existe pas. Il y a seulement de la glace. Beaucoup de glace. Et de la roche aussi. Mais il n’y a pas de vie : aucun oiseau, aucune plante, aucune autre bestiole... Rien. Il est loin le bouquetin que nous avons rencontré la veille.

Ce jour-là, nous sommes quelques humains à fréquenter cet autre monde. Ce monde dans lequel nous n’avons rien à faire. Ça peut paraître étrange. Mais je pense que c’est très simple. Ce qui sort à ce point de l’ordinaire m’attire cruellement.

Je me retourne et je vois cette immense crête que nous avons parcourue. Je suis vraiment passé par là ?

Nous prenons quelques photos et nous ne tardons pas à redescendre. La traversée de la crête se passe rapidement, puis nous rejoignons le col pour atteindre plus tard le refuge. La neige commence à tomber peu avant Sella.

Mais je m’en moque. Je viens de gravir un 4000m, mon premier qui plus est. La symbolique accomplie à ce moment là prend le dessus sur mes émotions.