Sortie du 15 juin 2019 La Meije - Pic Oriental (3891m) par le refuge de l’Aigle (3450m)

Magnifique course d'alpinisme sur cette montagne mythique qu'est la Meije, qui laissera à coup sûr, une trace indélébile dans nos mémoires.

Itinéraire, carte // Fiche topo

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Conditions météo

Temps mitigé mais température clémente le premier jour, suivie d’une chute de "poudreuse" une heure après notre arrivée au refuge de l’Aigle.
Extraordinaire ciel bleu le deuxième jour pour notre accession au sommet du pic oriental ainsi que pour la longue descente de 2250m de dénivelé, vers le pont des Brebis.

Récit de la sortie

Vidéo


Quel alpiniste ou même, randonneur, n’a jamais rêvé de poser les pieds sur un des sommets de la Meije ?

Montagne mythique par excellence, elle attire le regard et impressionne dès que l’on se donne la peine de gagner un peu d’altitude dans nos si belles Alpes.

Marine, Mick, Didier et moi-même avons décidé de tenter cette aventure, et avons formé deux cordées motivées et affûtées.

Premier jour - montée au refuge de l’Aigle (1800m D+)

Le départ du débonnaire pont des Brebis a eu lieu aux alentours de 9h00 du matin, un samedi, et la petite équipe démarre sur un bon rythme le sentier boisé des Aures en direction de la Passe du Midi.

Les arbres laissent rapidement la place à un sentier plus caillouteux, puis à de grands névés issus des dernières neiges tombées tardivement dans la vallée.

Les pentes blanchissent franchement et se remontent en lacets sur de bonnes traces laissées par les alpinistes qui nous ont précédé cette semaine.

Une cordée de cinq personnes se trouve devant nous, mais petit à petit, nous nous en rapprochons, notamment à la vue d’un imposant rognon rocheux qu’ils hésitent à gravir.

Nous les observons et finalement ils s’engagent dans l’escalade de ce dernier, nous décidons de les imiter.

La neige fond, vue la température clémente aujourd’hui, et les rochers sont bien humides.

L’escalade est délicate, et la prudence est de mise pour notre équipe, mais le ressaut est franchi et ceci nous permet d’y voir un peu plus clair sur la suite de l’itinéraire.

Nous poursuivons sereinement notre progression grâce à la présence de bonnes traces dans la neige, bien fraîches, laissées par la cordée devant nous.

Nous les apercevons, d’ailleurs, dans une pente qui parait bien raide, et qui semble être celle qui permet de rejoindre le col du Bec.

Notre tour arrive assez rapidement, et effectivement, la pente sous le col avoisine les 45 degrés, et la neige molle nous laisse allègrement nous enfoncer jusqu’aux genoux.

Il faut s’employer, mais le col est bien atteint et la barre des 3000 mètres d’altitude avec.

Nous en profitons pour entamer une petite pause sur l’arête qui est en fait celle du Bec de l’Homme, et nous domine de presque 400 mètres.

La suite se complique un peu et gagne en technicité, car nous remontons un passage rocheux constitué d’arêtes effilées où l’erreur n’est pas permise.

Néanmoins, l’équipe trouve finalement, ce passage ludique, celui-ci nous permettant de remonter cette arête orientée plein sud de façon plus variée.

Nous reprenons ensuite des pentes enneigées sur une partie d’arête plus large avant de basculer à droite, aux environs des 3200 mètres d’altitude, sur la vire Amieux.

Lorsque l’on prend pied sur cette vire, on se demande vraiment comment elle peut nous permettre de poser les pieds sur le glacier du Tabuchet, tellement elle impressionne...

Elle se descend à vue d’œil, sur plus de 50 mètres de dénivelé, mais plusieurs ressauts cachent la suite du cheminement.

Un câble faisant office de main courante est présent sur la totalité de la vire, et rassure grandement.

Nous nous vachons dessus et progressons prudemment, mais avec stupeur, arrive le moment où le câble n’est plus accessible.

Effectivement, les neiges récentes ont créé un mur de glace où le câble a été enseveli et celui-ci disparaît !

Ça plonge sur de grandes barres rocheuses qui dominent de presque 80 mètres le glacier du Tabuchet, à droite, et ce n’est vraiment pas engageant.

Néanmoins, la trace enneigée de la vire est praticable, celle-ci souvent à l’ombre, laisse la neige tassée et assez dure.

Nous progressons et finissons par rejoindre une portion de la vire où le fameux câble est à nouveau accessible, et ça fait du bien au moral !

Nous posons les pieds sur le glacier après nous être encordés, et l’objectif du jour constitué par le refuge de l’Aigle n’est plus si loin.

La progression sur le glacier du Tabuchet n’est pas technique, notamment grâce à la présence de grandes traces de pas et de raquettes, mais la fatigue et l’altitude ont fini par rendre mes jambes très lourdes en cette fin de parcours. (déjà 1650 mètres de dénivelé avalés à cet instant...)

La fatigue m’envahit à quelques encablures du refuge, et l’envie de faire une courte pause me prend.

Lorsque je me retourne, j’ai pas moins de trois cordées derrière moi qui semblent me dire "hééé, tu fais quoi là ! Avance " !

Je ressens tout à coup comme une grande pression, alors je repars de plus belle avec ce qui me reste d’énergie pour enfin rejoindre ce satané refuge, il est alors 15h30, et c’est soulagé et "rincé" que j’atteins ce havre salutaire perché à 3450 mètres d’altitude sur un rocher qui émerge d’une immense mer de glace.

Après avoir ôté mes crampons, je passe côté sud du refuge en circulant sur son balcon en métal, je m’aperçois avec effroi que ça plonge vraiment côté sud, et que cette face nous était bien cachée.

Le Pic Gaspard et son voisin le Pavé sont carrément monstrueux, et le Pic Oriental semble nous défier...

La vue est incroyable de cet endroit, notamment sur la vallée de la Romanche tout en bas, mais l’horizon ne porte pas bien loin car le ciel s’assombrit très rapidement.

On est bien dans le refuge, tout refait et moderne, on se détend et un bon thé nous apporte une chaleur salutaire, notamment au moment où la neige commence à tomber, il est alors presque 17h00.

Une neige fine de type poudreuse, qui se pose facilement sur les rampes du balcon du refuge et qui semble ne jamais vouloir s’arrêter.

Deuxième jour : ascension du Pic Oriental (450 D+)

Après une nuit (encore) agitée, le réveil, négocié la veille avec le gardien du refuge, a lieu un peu avant 5h00 du matin.

Petit déjeuner pris, équipés et encordés, nous quittons le refuge en deux cordées, et j’ouvre la route sur des traces à moitié effacées par la poudreuse tombée la veille, peut-être dix centimètres, peut-être plus.

Le ciel est complètement dégagé ce matin, les hautes cimes de la Meije et d’ailleurs s’enflamment, c’est grandiose !

Néanmoins, je m’avance seul, premier de cordée dans ce dédale blanc immaculé et mon moral, comme toujours lorsque je débute une course d’alpinisme de cette ampleur, est en berne.

J’ai peur ! Oui, toujours cette impression que je ne me sortirais jamais de cette aventure dans laquelle je me suis lancé volontairement.

L’impression d’avoir fait une grosse bêtise, et je me demande ce que je fais là !

C’est lorsque l’effort devient plus important, que mon corps se met à chauffer sur les pentes qui s’accentuent sous mes pas, que cette peur finit par s’atténuer.

Et ça arrive vite, car la pente à remonter pour atteindre l’arête de la Meije se rapproche de plus en plus, et elle paraît bien sévère, avec un dévers gauche assez important à négocier.

La neige de la veille ne facilite vraiment pas la progression, nos pieds s’enfoncent bien, les efforts demandés sont importants et le "cardio" s’accélère.

L’équipe pose enfin les pieds sur l’arête et le premier ressaut est déjà là !

Didier décide de passer devant, et l’attaque avec prudence, car l’escalade de celui-ci nécessite de la concentration et de la dextérité, car ça plonge à gauche !

Il faut ensuite négocier la descente vers une brèche et la traversée de celle-ci qui semble bien étroite.

Mick et Marine suivent bien derrière, et d’autres cordées nous emboîtent le pas également.

Après la brèche, c’est l’attaque du deuxième ressaut, moins technique que le premier, mais bien plus long.

Celui-ci avoisine les 45 degrés de pente sur le haut et Didier met tout ce qu’il a pour faire la trace.

Tout le monde va en profiter derrière lui, et moi le premier.

Puis, soudainement, la pente se fait moins rude, et le sommet enneigé du pic oriental nous apparaît !

Puis, quelques mètres plus loin, c’est l’hallucinant pic central, nommé également "Doigt de Dieu" qui surgit de nulle part, c’est magique !

L’arrivée au sommet est incroyable, enfin... l’arrivée aux sommets, car il y en a deux, un au nord face au fameux Doigt, et un plus au sud, qui d’après Mick, est le plus haut.

Nous allons rejoindre les deux, comme ça, il n’y aura pas de problème.

La joie nous envahit et nous immortalisons cet exploit avec nos appareils photos, tous les quatre avec notamment la perche de Mick, tout cela pendant que les cordées qui nous suivent depuis plus de 2h45 débarquent elles aussi, sur la partie sommitale de la Meije Orientale à 3891 mètres d’altitude...

Doigt de Dieu, Barre des Écrins, Grande Ruine, Agneaux, Rouies, Râteau, Pic Gaspard, Pavé, très proches, mais aussi, massif des Grandes Rousses, Belledonne, Arvan, Cerces, Thabor, Vanoise, Haute Maurienne, Mont Blanc, Grand Paradis, Mont Rose, Queyras, Viso, Ubaye, Embrunnais, Champsaur, Dévoluy, Vercors, tout y passe, c’est magique !

Deuxième jour : Descente (2250 D-)

La descente débute par 45 degrés de pente bien négociée, pour rejoindre le haut de la brèche sous le deuxième ressaut.

On sait qu’on va devoir passer du temps, tout à l’heure, pour la descente du premier ressaut (pas de II+ exposé), car la présence d’un relais incite vivement à effectuer la descente en rappel qui sera plus prudente pour toute l’équipe.

Mais contrairement à la montée, nous ne sommes plus les premiers !

La cordée de cinq coachée par un guide, satisfaite et reconnaissante de nos traces lors de la montée, a accepté de faire la descente devant nous.

De plus, le guide lance ses "ouailles" dans la descente directe de la brèche située entre les deux ressauts de l’arête, en évitant donc, le rappel du premier ressaut.

Cette descente débute par un bon 50 degrés de pente, et c’est cette cordée qui s’y colle.

Ben... Alors, nous allons suivre leurs profondes traces et finalement rejoindre relativement aisément le glacier sous l’arête du Pic Oriental.

Pas de rappel, et un retour au refuge plus tôt que prévu.

Merci l’équipe ! Sympa !

Nous récupérons au refuge, notre surplus d’affaires personnelles laissées pour l’ascension du Pic Oriental, et reprenons rapidement pied sur le glacier du Tabuchet, puis sur la vire Amieux.

Celle-ci est relativement bien négociée, et la partie dont le câble est indisponible momentanément ne nous a pas fait frémir.

La descente rocheuse des arêtes sous le Bec de l’Homme est ludique, même avec nos crampons, mais celle du col du Bec reste extrêmement raide et glissante.

Marine en a fait les frais en y perdant l’équilibre, mais a bien réagi ! Ouf !

La suite ? C’est droit dans les pentes enneigées avec le dénivelé négatif qui défile à vitesse grand V.

Sortis des neiges qui ne demandent qu’à fondre ces prochaines semaines, nous retrouvons le bon sentier en lacets qui nous ramènent doucement au parking du pont des Brebis.

Voilà donc, une grande aventure qui s’achève et qui soudera à coup sûr l’amitié profonde des membres de notre quatuor du weekend et fixera à jamais dans nos mémoires le souvenir d’une grande épopée glaciaire dans le massif des Écrins.

. Randonnée réalisée le 15 juin 2019

. Crédits : Un immense merci à Didier, qui a fait office de chef de groupe, comme il a pu le faire sûrement dans son ancien emploi, ainsi qu'à Mick et Marine pour leur tenacité, leur courage et leur gentillesse.

. Dernière modification : 21 juillet 2019 (Avertissements et Droits d'auteur)

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Afficher les commentaires précédents (9).
  • Très belle course, texte et photos à la hauteur, bravo à vous.

    Le 22 juin 2019 à 17h06
  • Beau récit, belles photos.
    Merci de nous permettre de ’gravir’ au fil des photos la Meije Orientale tranquillement assis devant son PC.
    Un grand BRAVO à l’équipe.

    Jean-Marc

    Le 22 juin 2019 à 19h03
  • Très belle sortie avec un texte qui nous emmène à vos côtés, de magnifiques images, merci pour ces étoiles partagées et un grand bravo à cette belle équipe ! Ça du dû être un grand bonheur, agrémenté d’un ciel pas possible ! 🙂

    Le 22 juin 2019 à 21h28
  • Merci pour vos commentaires ! effectivement, quand on en revient, on a l’impression de revenir d’un autre monde. Une course comme celle-là, pour moi, est plus dépaysante que tous les voyages dans les pays les plus éloignés de notre belle France.

    Le 23 juin 2019 à 09h13
  • Bravo pour cette magnifique ascension et ce très beau récit ! Les photos nous transportent...
    Quelle chance, je vous envie énormément ! Voilà quelque chose que j’aurais aimé faire ne serait-ce qu’une fois dans ma vie.
    Merci de nous faire partager un peu de ce rêve exaltant !

    Le 23 juin 2019 à 09h31
  • André

    superbes photos et une magnifique course, bravo à tous les quatre !

    Le 23 juin 2019 à 14h33
  • Merci pour ce beau récit qui nous emmène avec vous.....et pour les superbes photos aussi !
    Bravo à vous !

    Le 24 juin 2019 à 00h03
  • Vraiment superbe. Chapeau bas à toute l’équipe. Récit prenant et photos vraiment superbe. Ambiance haute montagne qui nous transporte. Merci.

    Le 24 juin 2019 à 22h14
  • momo

    salut mick
    belles photos je l’ai faite il y a deja une paire mais moins de neige a brasser c’etait en aout avec nuitée dans le refuge historique le nouveau a un peu gardé le style un courageux avait apporté un pavé béton au sommet ! qui etait déneigé pris le meme itineaire a la descente mais une immense rimaye barrait la traversée

    Le 25 juin 2019 à 17h21
  • guiseppe

    le coach en grande forme va bien se la faire la trace est faite

    Le 25 juin 2019 à 17h28
  • Nuts 84

    Très très belle sortie !
    La richesse et le détail des commentaires, agrémentés de surcroit par de magnifiques photos, viennent parfaitement compléter le topo !
    Merci pour cette évasion !

    Le 27 juin 2019 à 19h28
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