Sortie du 21 août 2022 par Valentin Ayela Pic Nord de la Font Sancte (3385m)

Le point culminant du Queyras dicte sa propre loi dans le Val d'Escreins. Il ordonne de traverser un chaos de pierres pour arriver jusqu'à son sommet. Il nous pousse dans les abîmes si l'on veut tutoyer le soleil. Et il nous rappelle qu'au coeur de ce "Val des Miracles" se trouve "la Fontaine Sacrée".

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Conditions météo

Parfaites, grand ciel bleu

Récit de la sortie

L’hiver est long à Saint Véran. Le roi du Queyras nous l’a enseigné. Mais le Val d’Escreins dicte sa loi dans la région. Il rassemble les couleurs, des vies semblables et solidaires, ainsi qu’un certain nombre d’objectifs dépassant les 3000m. Les queyrassins appellent cela : Le "Chant du Monde"...

Mes objectifs "rando" de 2022 étaient le Rochebrune et la Font Sancte ;

Je savais que le Rochebrune serait technique et difficile et que la Sancte proposerait un énorme défi.

Nous sommes partis sur deux jours, le lendemain de l’ascension du Rochebrune, depuis le refuge de Basse Rua : direction l’Oratoire puis le petit lac sans nom. Les sacs bien chargés pour le bivouac, nous progressons lentement au cœur du Val d’Escreins.

Alors comment ne pas toucher deux mots à propos de ce vallon....
C’est la première fois que je visite les lieux et j’ai une sensation familière. Il y a de la vie, beaucoup de gens qui s’y promènent, des animaux sauvages, et de nombreux mélèzes. Je remarque l’eau qui s’efforce de répondre présente en cette année caniculaire. Les montagnes qui nous entourent sont majestueuses, et forment un formidable rempart tout autour de nous pour donner cette impression de "bout du monde". Le Val d’Escreins s’inscrit sans nul doute à la table des joyaux des Alpes. J’y retournerai sans hésiter.

Nous marquons plusieurs pauses pour profiter des lieux. La plus longue se fera à l’Oratoire. De là, il est possible de rejoindre les sources de la Font Sancte, issues d’une belle légende.
Celles-ci sont malheureusement très faibles, voire complétement asséchées sur la partie supérieure.

Nous repartons d’une traite pour trouver notre point de bivouac. A environ 30min de notre objectif, nous croisons deux randonneurs ayant l’air plutôt aguerri. Je me doute qu’ils ont fait la Sancte mais je leur pose quand même la question. "C’était difficile de monter là haut ?"
Ils me répondent alors qu’ils ont renoncé dans le couloir, s’étant trop engagés sur la droite. Ils m’expliquent qu’ils auraient dû rejoindre les dalles rocheuses permettant d’escalader mais qu’ils étaient trop loin. Il est 18h passé lorsque nous échangeons. Ils étaient certainement partis tard. "Si vous voyez des cairns, suivez les. Et bon courage". Hahaha merci.

On arrive au petit lac sans nom, on monte le camp et on ne tarde pas à manger puis se coucher.

Je tiens à préciser, à ce moment du récit, que la Font Sancte est une montagne incroyable. De Basse Rua, c’est "la montagne", celle qui siège au centre du cadre, au fin fond du Val d’Escreins. Elle est entourée de très grandes montagnes. Mais elle les dépasse toutes. Son couloir est bien visible. On le sait. On le voit. On appréhende dans quoi on s’embarque. C’est comme si, plus on s’en rapprochait, plus la montagne essayait de nous dissuader. Ça me rappelle l’Aiglière et son pierrier, en quelque sorte. Au camp, on voit parfaitement ces 400m de couloir, et pour le moins que l’on puisse dire, ça surprend.

Réveil à 5h30, après une nuit bien courte. Nous nous préparons pour attaquer la Font Sancte. Vers 6h, un groupe de deux randonneurs passe à côté du camp en direction de l’objectif. Objectif commun donc !

La première partie consiste à traverser un sentier cairné nous menant à un bel éboulis.
C’est assez instable, mais la pente est encore douce. Je note à ce moment là que les pierres ont de drôles de couleur.
Plus nous progressons, plus ça se raidit. Nous rattrapons les deux hommes, plus en amont vers la droite, qui nous interpellent pour savoir si notre "coin" était plus praticable.
"Moui... !"

La pente s’inclinant de plus en plus jusqu’à atteindre les 40 degrés, les rochers laissent place petit à petit à des cailloux, puis à de la terre glissante, du gravier ou je ne sais quoi. C’est difficile de qualifier un tel terrain. Mais je dirai que oui, il y avait de la neige ici. Et paradoxalement depuis quelques années, la neige éternelle connait une fin.

Après un bel effort pour ne pas glisser, nous rejoignons le passage des vires rocheuses sur la gauche. C’était technique, car en même temps que nous grimpions, nous devions faire attention aux deux randonneurs en dessous de nous.

L’escalade n’est pas terrible, mais ça reste jouable. On atteint le replat à plus de 3000m face au pic Sud. Il ne reste plus grand chose. Mais le final est tout de même éprouvant. Nous sommes sur une pente humide et glissante dûe à la neige tombée la veille (que nous avons rencontré au Rochebrune).

Après tant de temps passé à m’entrainer et à appréhender cette montagne ; tant de temps passé dans ce couloir ; nous y sommes. La victoire.

La vue de ce sommet est légendaire. Entre l’abominable Pic Sud en premier plan, le Viso plus loin et pourtant si proche, les Ecrins, le Morgon, le Ventoux ou le Mont Rose en finissant sur le Mont Blanc...

A ce moment là, à défaut d’être subjugué par le spectacle, nous craignions la descente. Suite à une bonne pause bien méritée, nous attaquons les choses encore plus sérieuses. C’est une sacrée bavante à descendre. Mais nous l’avons fait ! J’étais si heureux de l’avoir fait en arrivant au camp. Quel grand souvenir...

La montagne nous a appris que ce qui vaut la peine de vivre vaut aussi la peine de mourir. Mais le point culminant dicte sa propre loi dans le Val d’Escreins. Il ordonne de traverser un chaos de pierre pour arriver jusqu’au sommet, il nous pousse dans les abîmes si l’on veut tutoyer le soleil, et il nous rappelle par dessus tout qu’au cœur du Val des Miracles se trouve la "Fontaine Sacrée". Nous appelons cela : le "Chant de la cruauté",
ou...

la "Font Sancte".

. Randonnée réalisée le 21 août 2022

. Dernière modification : 12 juillet 2023 (Avertissements et Droits d'auteur)

Auteur :

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  • Beau récit et bravo pour cette rude ascension !

    Le 18 juillet 2023 à 07h47
  • Merci !

    Le 23 juillet 2023 à 00h52
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