Sortie du 9 août 2023 par Yann Aiguille de la Grande Sassière (3747m)

Beau mais vent glacial et terrain gelé

Je trouve qu’on a un peu tendance à la sous-estimer cette Grande Sassière, y compris ici ! Ce qui était, quand j’ai commencé la montagne au siècle dernier, un sommet relativement confidentiel pour les randonneurs, un objectif ambitieux, accessible seulement quelques jours dans l’année, est devenu ces dernières années une vraie autoroute, un défilé, un but à collectionner en ignorant tout le reste. Plus haut sommet randonnable, bla bla bla, dans toutes les listes de 3000 à collectionner, bla bla bla. Bon je n’insiste pas, je suis un vieux c... et c’était mon quart d’heure coup de gueule.

Sortie du 09 Août 2023

Pas vraiment dans mes projets de cet été cette Grande Sassière, mais quand on me propose d’y aller, je saute sur l’occasion ! J’ai d’excellents souvenirs de ma première le 5 août 2017. Je suis largement plus en forme cette année, ça devrait encore mieux se passer.

Nuit au Saut, au parking. Je m’attendais à pléthore de tentes, on ne sera que 2 ! Il y a du monde mais tous sont dans leur véhicule aménagé.

Si la soirée fut agréablement fraîche, la nuit ne fut pas terrible (j’ai pas encore l’habitude et je ne dors jamais très bien) et un peu froide, comme me le confirme le givre sur la voiture au petit matin. Ben oui on est à 2200 !

Après un petit déjeuner vite avalé, un café chaud bienvenu et le pliage toujours plus compliqué et plus long que prévu des tentes, c’est l’heure de se mettre en route. Le dilemme est toujours le même, est-ce qu’on prend les crampons et le piolet ou préfère-t-on la légèreté du sac ?

Le sac n’étant déjà pas très léger à la base, avec les trois litres d’eau et toutes les couches, on décide de prendre les crampons et le piolet quand même, c’est plus sûr ! La pyramide sommitale est encore un peu blanche du saupoudrage du week-end.

Je ne me souvenais pas que ça grimpait autant, aussi vite ! Aouch que c’est raide cette première partie ! La nuit courte et le poids du sac... Tous ceux partis après nous nous doublent. Tous sont en léger... la plupart en chaussures basses et souples. On a vraiment l’air de lourdauds avec tout notre bardas et nos piolets sur le sac.

Ça ne nous empêche pas d’avancer quand même. Peu de pauses mais un train régulier.

Le vent souffle fort, et il ne fait pas chaud. On enfile gants et bonnets. Un groupe descend, qui a bivouaqué sur les replats plus haut. Ils sont emmitouflés au possible et me disent que le sommet est bien gelé. Je n’aurais peut-être pas monté mes crampons pour rien après tout.

Nous rattrapons un couple peu avant le passage permettant d’accéder au bord du glacier, où un reste de névé est là, mais pas gênant. Nous ferons un bout de chemin ensemble, mais ils n’iront pas en haut.

Dès le bord du glacier, le vent se déchaine, abaissant encore la température. Ça caille vraiment ! Ça promet pour le sommet.

Au pied de la pyramide sommitale (il reste encore 300 m à gravir), quelques uns font demi-tour. On poursuit en se demandant des fois à quoi bon ! Les nuages englobent le sommet, le vent hurle et il fait vraiment froid.

Le sol est tout gelé mais ça avance bien sans crampons. Seul un petit passage enneigé d’une cinquantaine de mètres, juste sous le sommet, oblige ceux qui descendent à la plus grande prudence... Faut dire que certaines chausses n’aident pas !

Finalement on y arrive au sommet. Curieusement le vent ne souffle pas en haut ! Il fait largement meilleur. Mieux, on y reste un moment et la vue se dégage un peu partout, y compris sur le mont Blanc. C’est toujours aussi beau ! Seules les Alpes Suisses resteront couvertes.

Temps de redescendre affronter le vent ! Descente prudente sur un sol qui dégèle à peine.

Une foule monte. C’est hallucinant ce monde. À les entendre, certains se demandent ce qu’ils font là... faut dire qu’avec ce vent !!! D’autres ont déjà enfilé toutes leurs couches à 3200 et se plaignent du froid... Montez donc encore plus haut. Enfin beaucoup sont en short et survêt. Pourquoi pas, après tout. Vous verrez par vous même. Moi, je suis bien content d’en avoir fini.

C’était ma seconde ascension, très différente de la première et je ne suis pas près de l’oublier. Je ne pense pas qu’il y aura de troisième. C’est magnifique mais il y a tellement de montagnes moins fréquentées.

Retour à la voiture en début d’après-midi. Les crampons et le piolet seront restés dans le sac.